Analyse et compte-rendu – pigeons voyageurs
Sur l’ouvrage « Influence des facteurs naturels sur le déroulement des vols de compétition des pigeons voyageurs » du colonel Henri Tamboryn.
La rédaction m’a invité à consacrer une analyse de fond à l’ouvrage fraîchement publié en langue néérlandaise « Natuurlijke invioeden op wedstrijdvluchten met reisduiven » (152 pages) de Henri Tamboryn, colonel à la retraite des Forces Aériennes belges.
J’entamai ma lecture non sans attentes, tout simplement parce que je pouvais espérer voir se réaliser au travers de l’oeuvre en question un de mes souhaits moult fois exprimé: j’ai fait observer depuis longtemps que les responsables ne se souciaient souvent qu’aux conditions météorologiques sur le lieu du lâcher et non à l’évolution potentielle de ces dernières lors du retour des pigeons. Mes attentes ne furent pas déçues. L’auteur a réalisé une étude scientifique résultats de concours s’échelonnant entre .Bourges et Barcelone pour les années 1990 et 1991. Il a essayé d’interpréter autant que faire se peut les résultats ainsi que les variations apparaissant entre différentes régions pour ces mêmes résultats. Pour cela, ii collecta toutes les données météorologiques des zones géographiques tout au long desquelles le vol de retour s’effectuait, mais également il recueillit les données relatives aux conditions qui régnaient au moment où !es pigeons venaient d’effectuer leur passage sur la ligne de vol, chose fort importante.
De la sorte, on peut obtenir une image de ce que les pigeons ont rencontré réellement en cours de route. Parallèlement à cela, il y eut toute une salve de travaux de calculs. A tel point que ceux-ci furent effectués non seulement pour les vainqueurs mais également pour les pigeons qui s’étaient classés prix par 80, puis prix par 8 et enfin prix par 4. Ainsi une liste fut dressée de facteurs météorologiques qui influèrent plus que probablement sur le résultat des concours: le vent, la nébulosité, les précipitations, la température ambiante et le degré d’humidité, l’intensité du magnétisme terrestre et la visibilité.
Il n’est pas dans nos objectifs de présenter un résumé sur chaque rubrique. Je peux toutefois affirmer que mes interprétations en la matière coïncident pratiquement en tous points avec ce qui fut mis scientifiquement en évidence par Tamboryn. Je tiens à pointer ici plus spécialement le rôle de la visibilité, l’acceptation du plancher des 800 m/m pour le calcul de la vitesse de vol, la réfutation de toute influence du géomagnétisme sur l’orientation du pigeon, la possibilité de remporter un premier prix avec une avance exceptionnelle. En ce qui concerne l’influence de la température ambiante, la conclusion est que les températures s’échelonnant entre 10°C et 20°C constituent un idéal et que celles qui dépassent les 30°C sont fort défavorables. Avec des températures aussi élevées, la situation devient critique. Et l’auteur de l’étude de prôner tout simplement la remise du l. Personnellement, je ne suis pas du tout d’accord avec cette assertion: il existe toujours une possibilité pour que rien ne change le jour suivant. J’ai toujours défendu l’idée que l’on devait quand même lâcher si les autres conditions météorologiques sont favorables. Il s’agit quand même de concours de fond, non? Il appartient à l’amateur de savoir si le risque que fait courir l’amateur à ses pigeons est surmontable ou ne l’est éventuellement pas. Ceci me donne l’occasion de faire la transition sur les lâchers retardés des concours de grand fond tels qu’ils continuent à se pratiquer.. toujours de manière générale aux Pays-Bas. Me basant sur les données biologiques essentiellement théoriques, je persiste à dire que cela reste une injure au bon sens. Par ailleurs, le travail de Tamboryn en établit clairement les preuves concrètes dans la pratique. Il existe toutefois quelques autres points sur lesquels je ne m’accorde pas avec le colonel Tamboryn. D’une part, je trouve que l’auteur de l’étude met trop l’accent sur l’effet défavorable du vent de directions variées lors d’un retour. D’autre part, Tamboryn aborde l’effet de masse en le présentant comme un phénomène « d’aspiration » d’une masse minoritaire de pigeons dans une région déterminée par une masse majoritaire de pigeons d’une autre région. Je ne le vois pas sous cet angle. Pour moi, il ne peut être question par exemple de pigeons limbourgeois se laissant entraîner par celle de l’ouest du pays, et qu’ils en aient ras-le-bol, faute de motivation, en voyant tomber quelque part ailleurs des pigeons (cf. p. 78). Cette explication est bien trop anthropocentrique. Je ne puis accepter de tels raisonnements. D’un autre côte, lors des vrais concours de fond, il ne se forme plus du tout des groupes importants.
Les pigeons de tête volent en solitaires. Cependant, si l’effet de masse était excessivement important il ne se pourrait jamais qu’un premier prix national soit remporté dans l’extrême sud-est de notre pays, étant donné leur participation limitée.
Et pourtant ce fut bien le cas lors de ces dernières années: dans les régions de Virton et d’Arlon, on compte plusieurs vainqueurs nationaux.
C’est la direction du vent et son intensité qui est la composante favorisant l’endroit où tombent les pigeons en premier. Lorsque le vent leur est favorable (de secteur ouest), les amateurs de cette région peuvent prétendre à la victoire finale. En ce qui concerne la démotivation énoncée précédemment, elle est imputable à mon avis à une fatigue physique tout simplement. Je peux faire état d’un événement à ce sujet. L’incident s’est produit lors du concours international. de Pau, le samedi 26 juin 1993.
Mon ami Colbrandt de Bottelare-Merelbeke, à quelques kilomètres au sud de Gand, eut son premier pigeon de retour le soir du lâcher. ll le constata à 21h 59′ pour une distance de 904 km et enleva la 35ème place à l’international face à 7.760 concurrents.
Quelle ne fut pas la surprise de mon ami lorsqu’il vit arriver en même temps que son pigeon, un étranger qui se précipita également à l’intérieur du colombier. Il apparut rapidement qu’il s’agissait d’un Hollandais de Kerkdriel, non loin de ‘s Hertogenbosch, dont la distance de vol était de 1.035 km. Il était clair que ce pigeon ne pouvait rallier ses pénates le jour même.
Mais en réalité, le pigeon aurait pu poursuivre sa route encore quelque temps à condition qu’il soit resté dans un état de fraîcheur suffisant. Soit dit en passant, j’ai trouvé au résultat quelques pigeons officialisés après 22 heures et même un à 22h16′ alors que la neutralisation était fixé à 22h 30′ Le pigeon hollandais de Kerkdriei était en fait épuisé.
On ne peut donc pas parier ici de phénomène d’aspiration faute de motivation. Le lendemain matin; à la lueur du jour, mon ami Colbrandt remit le pigeon en liberté mais le pigeon D’en montra guère l’envie.
Il n’avait plus que probablement pas récupéré en suffisance malgré d’excellents soins donnés. Ii put prendre son envol à 6h 15′ du matin pour atteindre son colombier à 8h 14’.
De ce fait, il remporta le 1 er prix dans sa région et enleva la 199ème place internationale, ce qui, en définitive, reste une belle. performance. Qu’on ne se trompe pas sur mes intentions, je ne critique par pour le plaisir de critiquer. Tous ces différents thèmes, je les ai déjà abordés en âme et conscience, en tant que chroniqueur. Je tiens également à ajouter directement certains chercheurs sont arrivés à la conclusion que les pattes peuvent évacuer une quantité de chaleur équivalente au tiers de la production totale. Il faut préciser que ce n’est pas une règle Générale. En effet, cela dépend principalement de la température ambiante et du degré d’exposition des pattes et des orteils au flux d’air (fig. 1).
Ainsi lors d’expérimentation dans un tunnel de vol, on a montré que lors d’une température de 7,5 °C, • les pattes sont totalement enfouies dans les plumes ventrales; après un certain temps elles sont tirées en arrière vers les plumes caudales. Pour des températures plus élevées les pigeons ont laissé pendre les pattes de plus en plus, ce manière à les exposer davantage au flux d’air.
Entre 15 et 20° C, les pigeons volent également le bec légèrement entrouvert. Ces deux constatations démontrent que, mêmes si les expériences de vol en tunnel ont été réalisées de façon ingénieuse, les résultats obtenus d’un point de vue physiologique ne sont pas entièrement satisfaisants. En effet, même les jours de grosses les pigeons en bonne santé qui volent en toute liberté, tiennent le bec fermé. L’on peut voir, également qu’ils tiennent le pattes serrées contre le ventre, rendues vers la queue, les orteils écartés, mais ne les laissent sûrement pas pendre. Cela ne leur apporterait aucun avantage: laisser pendre les pattes serait un frein (contraire aux lois de l’aérodynamisme). Ceci conduit à une meilleure résistance à l’air lors du vol entraînant un effort musculaire plus important, donc à une plus grande production de chaleur. Ce qui est gagné d’un côté (plus de refroidissement) est perdu de l’autre (production de plus de chaleur).
Pour clôturer cette partie de la discussion, je voudrais dire que le Professeur Nachtigall et ses collaborateurs ont réussi à montrer, grâce à des photos en infra-rouge, de pigeons volants, les endroits du corps où se produisent les déperditions de 1 chaleur, soit la tête (bec et narines), à la surface des pectoraux, aux pattes et à la partie inférieure des ailes (fig.2).
Cela prouve que cette équipe de chercheurs est sur la bonne voie. En suivant les oiseaux migrateurs au radar, par temps très chaud, on a constaté qu’ils peuvent voler 1 parfois à très haute altitude (4 et même 10 km de hauteur); ils cherchent probablement une solution à leurs problèmes de chaleur. Nous savons en effet que la température de l’air diminue avec l’altitude d’environ 6.5° C par 1.000 mètres. Maintenant, il faut se poser la question de savoir si les pigeons, lorsqu’ils volent par temps très chaud’: sont capables d’utiliser la même tactique. Il n’est pas possible d’y répondre avec certitude. J’oserais affirmer que !es pigeons sont capables de voler à haute altitude, mais uniquement par vent arrière.
Dans les circonstances les plus pénibles. Avec un vent de bec, ils volent au ras du sol car à ce niveau la force du vent est atténuée à cause du frottement de l’air sur le sol.
Appréciation de la température.
Lorsque nous nous rappelons l’ensemble des mécanismes de régulation, nous sommes amenés à admettre que le corps du pigeon est sensible à la température interne et externe. Le pigeon possède en effet un « sens de la température » bien développé. Dans la série d’articles sur « les organes des sens du pigeon » j’ai décrit les sens les plus importants.
C’est pourquoi la description du « sens de la température » n’y était pas: ce sujet ne pouvait être traité avec succès que dans le cadre de la thermorégulation.
La perception est réalisée par des cellules spéciales, appelées thermorécepteurs et qui sont particulièrement sensibles aux modifications de température. Si l’on trouve quelques cellules à l’intérieur du corps c’est principalement au niveau de la peau, sur les commissures du bec, dans l’orifice buccal, la gorge et le nez.
Ce sont dans ces derniers endroits, que l’air est inspiré et la température estimée.
De là, les signaux sont conduits le long des nerfs au centre de la thermorégulation situé dans l’hypothalamus où se produit l’intégration: L’hypothalamus est un centre de coordination, une sorte de poste de commandes.
De là, les ordres sont transmis via les nerfs, afin que les différentes réactions physiologiques, nécessaires au maintien de la température corporelle interne; se produisent. De cette manière, le cercle est bouclé.
[ Source: Article édité par Prof. Dr. G. Van Grembergen – Revue PIGEON RIT ]
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Enlogement des pigeons voyageurs