Immunité – pigeon voyageur
Dans un article récent, l’amateur interviewé affirme: « pendant l’hiver, je ne donne aucun médicament à mes pigeons de manière à leur laisser se faire une immunité ».
Que penser de cette technique?
Nous allons voir pourquoi elle est assez logique.
Tout d’abord qu’est-ce que l’immunité?
C’est l’aptitude d’un organisme vivant à ne pas contracter une maladie. Cette faculté est soit naturelle soit acquise. Naturelle c’est l’aptitude du pigeon à être naturellement réfractaire à la rougeole de l’homme ou à la maladie de Carré du chien. Signalons au passage que cette immunité naturelle n’empêche pas certaines espèces d’être porteuses saines: ainsi on trouve très fréquemment le virus de la grippe humaine chez … les canards sauvages. On dit alors que cette espèce est un réservoir de virus (de la grippe humaine). Mais pour ce qui nous intéresse au premier chef, c’est-à-dire la santé de nos pigeons, la notion d’immunité acquise est la plus importante. Lorsqu’un individu a contact avec l’agent d’une maladie, il y réagit rapidement. Si c’est un microbe (bactérie) ou un virus, les globules blancs (leucocytes) du sang l’attaquent immédiatement, l’entourent « comme une pieuvre » et s’efforcent de l’anéantir en le digérant. Parmi ces globules blancs, les lymphocytes B (B comme bourse de Fabricius dans la région anale des oiseaux, organe producteur des antigènes) supportent des immunoglobulines qui sont des récepteurs d’antigène. Ces principes sont spécifiques c’est-à-dire que selon les lymphocytes, les couples immunoglobuline-antigène ne bloquent que l’agent d’une maladie spécifique. Par exemple l’antigène de la variole (poquettes) ne bloque que le virus de la variole. Malheureusement, l’aptitude de l’organisme à faire des anticorps contre tel ou tel assaillant est très variable. Si le virus des poquettes provoque une bonne réaction de défense qui se prolonge pendant de nombreux mois, l’immunité acquise après une attaque de coryza (dont on connaît les multiples facteurs microbiens-parasitaires et éventuellement viraux) est très brève donc permet une rechute rapidement. L’immunité parasitaire est encore plus aléatoire. Dans les colonies où sévissait une trichomonose chronique, on n’a jamais assisté à une éradication spontanée du parasite et un traitement moderne sérieux n’empêche pas les rechutes. Il en est de même des vers. Les traitements médicamenteux réguliers assortis de désinfection thermique pour éliminer les œufs restent les seuls efficaces pour éradiquer les parasitismes.
C’est donc uniquement – dans la pratique – contre les microbismes et les maladies virales qu’on peut espérer obtenir une immunité acquise naturellement.
Pour beaucoup d’entre elles, la virulence du germe met l’intégrité et même la vie du pigeon en danger.
Un contact avec la salmonelle (paratyphose) risque fort d’être plus dangereux pour l’avenir de la colonie que l’espoir d’une immunité naturelle acquise. Maladie la plupart du temps sournoise, à évolution lente, la paratyphose finit souvent par prendre un tour aigu après un temps plus ou moins long, ce qui laisse sceptique sur une immunité naturelle acquise. Conférer progressivement une immunité contre telle ou telle maladie suppose l’administration d’un vaccin. Qu’est-ce qu’un vaccin? C’est une suspension – dans l’eau ou dans l’huile selon les cas – de l’agent de la maladie (microbe ou virus) soit tué (par la chaleur 55 °C – soit par un antiseptique formol – soit par les deux) soit inoffensif par une technique spéciale ou naturellement inoffensif (souche La Sota vaccin antipoquettes). Injecté dans l’organisme du pigeon (sous la peau – dans le muscle – dans l’épaisseur de la peau) il y crée la réaction qui confère l’immunité, d’autant mieux que cet organisme n’a pas à lutter contre un germe virulent qui l’affaiblit.
Malheureusement aucun vaccin ne confère une protection plus longue que ne l’aurait donnée la maladie elle-même. C’est pourquoi il faut se méfier des ragots qui assurent qu’un pigeon vacciné une fois dans sa jeunesse est protégé pour la vie.
Ce qui se passe dans certains cas, c’est que, sous la protection d’une vaccination, un pigeon se trouve en contact avec le germe virulent de la maladie. Il y a alors une « survaccination » naturelle qui prolonge d’autant la durée de l’immunité. Faut-il préciser que si cela est bénéfique, cela est aussi très aléatoire, l’amateur n’ayant aucun moyen de savoir où et quand le contact a eu lieu.
Que conclure de tout cela?
Si l’on prend les diverses maladies habituelles des pigeons, quelles qu’elles soient, on voit que l’établissement d’une immunité naturelle par contact avec un germe, fût-il dans le cadre discret de Il porteur sain « , est tout à fait aléatoire. Soit parce que ce germe ne déclenche pas une immunité valable (les maladies parasitaires par exemple) soit parce que l’immunité qu’il établit n’est ni suffisante pour éliminer ce germe ni assez durable. Chacun sait qu’il faut peu de choses pour que la mue ne soit pas optimale. Il ne s’agit pas ici de vous faire courir chez le vétérinaire pour un diagnostic complet et coûteux. Mais si vous constatez des gorges glaireuses, des fientes anormales, si le plumage nouveau ne vous semble pas parfait, n’attendez pas qu’une immunité éventuelle s’établisse, faites tout de suite le traitement médicamenteux nécessaire.
Vos pigeons vous le rendront au centuple.
[ Source: Article édité par Dr. J.P Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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