L’instinct de propriété – pigeon voyageur
Les émissions de télévision sur les animaux se multiplient. Et fréquemment nous entendons parler de « territoire » quelle que soit l’espèce étudié: le lion marque le sien d’un jet d’urine sur les troncs d’arbres ou les buissons qu’il considère comme ses limites, l’épervier « se garde » quelques kilomètres carrés de ciel, les fourmis ont leur fourmillière et le terrain qui l’entoure etc. etc. Il y a à cette notion bien réelle, des lois intangibles: malheur au lion qui pénètre sur le territoire d’un autre, à l’épervier qui « s’égare », à qui pénètre dans la fourmillière sans en faire partie: tous ces intrus sont immédiatement attaqués, pour-suivis et au besoin physiquement éliminés. Mais ce territoire est spécifique: c’est-à-dire que si un jaguar pénètre sur le territoire d’un lion, il n’aura pas à en subir la colère, un aigle sur le territoire d’un épervier etc. Seule la fourmillière, la ruche sont protégées à l’absolu. Cet instinct de propriété fait donc partie d’une des constantes de la nature avec la sexualité et l’élevage des jeunes (au moins pour la femelle. Dans beaucoup d’espèces le mâle ne s’intéresse guère à sa progéniture).
Qu’en est-il pour nos pigeons?
Chacun connaît la nécessité colombophile d’une case (ou d’une planchette) pour chaque pigeon. Il faut mettre en garde les débutants contre le surnombre. Pour les pipants, un jeune, une case ou une planchette. Si un pipant n’a pas sa planchette, il se bat et le vaincu désertera le colombier très rapidement. Beaucoup de pertes « au toit » n’ont pas d’autre cause. Même plus âgé, le pigeonneau volera (au concours) « pour sa planchette », au point qu’une technique de préparation consiste à réunir juste avant l’enlogement, deux colombiers de pipants en un seul, chacun voulant prendre la planchette correspondante. Rivalité de propriétaires. Lorsqu’on a affaire à des adultes ou jeunes adultes, la planchette ou la petite case individuelle, est remplacée par une case plus spacieuse. C’est que le couple qui s’est constitué va y élever. C’est l’élevage qui renforcera l’instinct de propriété. C’est lors de ce premier élevage et pour tout le temps que durera la présence au colombier que les 2 conjoints défendront jusqu’à épuisement leur propriété. Le veuvage a fait croire que la motivation première du veuf était la sexualité. C’est certes un élément, mais ça n’est pas le premier. De plus en plus souvent, des yearlings sont exploités en célibataires, sans aucun contact sexuel pendant 6 ou 8 semaines. Beaucoup y font florès, sans autre motivation que la propriété de leur nichette. J’ai raccouplé en août mes femelles veuves, mais une partie d’entre elles, reçoivent, venant d’un autre colombier, les yearlings réchappés de la sélection de fin de saison. Beaucoup de ces femelles n’ont pas vu de mâles depuis 4 ou 6 semaines, après pertes ou élimination pour résultats insuffisants.
On pourrait penser que ce nouveau conjoint va être accueilli « à bras ouverts » et les noces vite consommées. C’est vrai pour quelques couples mais pour d’autres la femelle, occupante des lieux, n’admet pas cet intrus et le lui montre immédiatement par la manière forte. Certes la conciliation tarde peu mais force est de constater que dans au moins 50% des cas, l’instinct de propriété prime sur l’instinct sexuel.
Certains amateurs exploitent cela avec leurs veufs. Un pigeon, généralement choisi de couleur claire est dressé à aller de case en case « voir ce qui s’y passe » et exacerber ainsi la crainte de chaque pigeon de le voir prendre la case en son absence. Et cela en l’absence de toute présence de femelle. En plus de cet instinct de propriété d’une case, l’ouverture d’une case inoccupée crée aussitôt une compétition pour la possession de cette case supplémentaire. Cela donne d’excellents résultats mais présente l’inconvénient de batailles continuelles si on veut donner cette case à un autre couple ultérieurement. Cela peut intéresser les amateurs qui ont peu de pigeons dans un grand colombier. J’ai eu un ami dont le meilleur pigeon, lorsqu’il arrivait en grande forme, expulsait le veuf de la case du dessous et veillait continuellement à défendre l’entrée de ces deux cases. Alors commençait une extraordinaire série de succès en particulier dans le grand demi-fond et le fond. Cela dura ainsi plusieurs saisons. Ainsi apparaît une notion que beaucoup d’amateurs comptent pour négligeable comparée aux motivations d’ordre sexuel ou familial. Cela fait partie en fait de la plus profonde nature animale (et humaine) dont il nous appartient d’explorer et d’exploiter au besoin tous les aspects.
Doct. Vét. J.P.Stosskopf
Notices :
- L’instinct de propriété fait partie d’une des constantes de la nature et se retrouve en fait chez tous les animaux. Le lion par exemple marque son territoire d’un jet d’urine sur les troncs des arbres ou les buissons qu’il considère comme ses limites.
- Pour un pigeonneau sevré, la petite case ou une planchette constituera très vite son premier territoire. Cet instinct de propriété se manifeste très tôt et il faut veiller à ce que chaque pigeonneau puisse se choisir une petite place. Tout cela est très évident pour la plupart des colombophiles mais les débutants n’y pensent pas toujours et perdent ainsi facilement des jeunes.
[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P.Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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