Jeu au naturel – pigeon voyageur
Un lecteur habitant le Nord de la France m’a posé la question suivante: « Pouvez-vous me dire si l’idée de mettre à la disposition de deux couples de pigeons voyageurs, un couple de reproducteurs, est une excellente idée et peut être mise facilement en pratique?
Personnellement je crois que cela me permettrait d’obtenir pratiquement les mêmes prestations qu’avec le système du veuvage. Les pigeons qui voyagent (mâles et femelles) n’auraient pas à gaver leurs jeunes puisque cette tâche serait assurée par le couple de reproducteurs.
Un premier avantage de ce système est à mon avis le fait, que les femelles peuvent aussi être jouées, d’où possibilité d’en découvrir d’excellentes pour le colombier d’élevage.
Un deuxième avantage c’est qu’ainsi on pourra avoir durant toute la saison des jeunes aussi bien des éleveurs que des voyageurs. Si ce système pouvait être réalisé, ma colonie se composerait de deux tiers de voyageurs et d’un tiers de reproducteurs. Je voudrais avoir votre opinion. »
Réponse:
Si j’ai bien compris la question de cet amateur français, il compte accoupler ses voyageurs et ses reproducteurs le même jour. Une fois des jeunes dans le plateau, il laisserait pour compte des voyageurs un seul jeune de telle sorte que les jeunes de deux couples peuvent être nourris par un couple de reproducteurs.
Je voudrais tout d’abord faire la remarque suivante: Ce système occasionnera non seulement beaucoup de travail mais les chances de réussite sont très minimes. Bref, je ne conseille pas d’agir de cette façon.
Le jeu au naturel peut être appliqué d’une manière beaucoup plus simple et plus efficace. Pour commencer on laisse couver les pigeons pendant 17 à 18 jours. Pendant cette période les femelles peuvent être jouées avec succès. Dès qu’il y a des petits jeunes (nouveaux-nés) on peut essayer les mâles dans un concours, certains réaliseront une très belle prestation sur cette position de nid. Cette même position n’est généralement pas idéale pour les femelles tout comme la position d’oeufs piqués (prêts à éclore). Dès que les jeunes sont âgés de cinq à six jours et que le lait de jabot est presque épuisé, les femelles arrivent sur la meilleure position de nid. A partir de ce moment on pourra éventuellement fair appel à un couple d’éleveurs pour nourrir les jeunes des voyageurs. Mais si on fait cela; que mettre dans les plateaux des voyageurs? D’autres jeunes? Dans ce cas, les voyageurs vont se mettre automatiquement à nourrir ces jeunes de telle sorte que tout le système n’a pas de sens. Ce qu’on pourrait éventuellement faire c’est enlever les voyageurs de leur colombier et les laisser seulement le soir pendant quelques heures avec leurs jeunes qui ont été nourris au préalable par les reproducteurs.
Bien vite cependant les voyageurs perdront leur amour pour leurs jeunes, du fait que ceux-ci n’accepteront pas d’être nourris. Résultat: les voyageurs se remettront à faire un nid. Ceci démontre encore une fois que le système que notre ami français voudrait mettre en pratique n’est pas valable. Je conseillerais d’accoupler les reproducteurs une semaine après les voyageurs de telle sorte qu’on dispose toujours de plus petits jeunes pour les voyageurs.
Un système:
Voici d’après moi un système valable. Pendant la couvaison jouer les femelles, à la naissance des jeunes jouer les mâles et dès que les petits jeunes sont âgés de 7 à 8 jours, enlever les mâles du colombier. Chaque soir pendant que les femelles s’entraînent, remettre les mâles au colombier. Les femelles pourront rester pendant une demi-heure dehors et ainsi les mâles assureront une partie du travail de gavage. Les mâles doivent être enlevés du colombier avant de permettre aux femelles de rentrer dans leur colombier. A ce moment mâles comme femelles peuvent être joués avec succès. Au retour d’un concours on les laissera ensemble pendant une heure au colombier. Après cela les mâles retourneront dans un autre colombier ou une volière. Les mâles ne doivent pas nécessairement voler (s’entraîner) durant toute la semaine. Dès que les jeunes sont âgés de 15 à 16 jours, ils seront remplacés par d’autres jeunes âgés d’une dizaine de jours. Cela permettra d’une part de prolonger la bonne position de nid et de retarder un peu la nouvelle ponte. Dès que les jeunes seront bien dans les plumes (± 18 jours), les mâles seront remis dans le colombier et pendant qu’ils feront leur entraînement du soir, les femelles iront au colombier pour nourrir les jeunes. Dans cette position de nid, on remettra les femelles avant l’enlogement au colombier où elles pourront rester un petit moment en compagnie de leur mâle et de leurs jeunes. Ce sera, pour les femelles le dernier concours sur ce nid. Au retour du concours les mâles et femelles ne trouveront plus aucun jeune au colombier, ces derniers auront été enlevés pendant leur absence. Mâles et femelles resteront alors ensemble mais les femelles resteront à la maison le week-end prochain parce que le moment d’une nouvelle ponte approche. Les mâles sont alors dans une bonne position de nid, certainement pour les concours de vitesse parce qu’ils sont en période de chasse au nid. Même avec seulement un oeuf dans le plateau le mâle peut réaliser de bonnes prestations. Huit jours plus tard les femelles pourront à nouveau être enlogées sur des oeufs de plus ou moins huit jours et les mâles pourront se reposer. Ensuite on peut suivre la même méthode que celle appliquée au premier nid.
La pratique:
Le système que je viens d’expliquer semble être facile à appliquer… du moins en théorie. Dans la pratique se posent cependant certains problèmes. Le plus important pour réussir avec ce système c’est de veiller à ce que les positions de nid de tous les couples restent les mêmes. Cela signifie que les femelles, à chaque nouvelle tournée d’élevage, doivent pratiquement pondre ensemble. Une différence de trois à quatre jours peut être solutionnée soit en laissant couver les couples, qui ont pondu plus tôt, au-delà de la période de 18 jours; soit en glissant sous les couples qui ont pondu quelques jours en retard, deux à trois jours avant l’éclosion un oeuf piqué (prêt à éclore).
Pourquoi est-ce si important?
Au moment où les mâles sont séparés des femelles et que celles-ci restent seule avec les jeunes il ne peut rester au colombier aucun mâle. Si on garde un seule mâle au colombier, ne fût-ce que pour couver tout le système sera dérangé. Une femelle qui couve dans un colombier pendant que les mâles sont avec un grand jeune seul dans le même colombier n’est pas aussi dangereux mais il faut néanmoins l’éviter.
Il est certain qu’il n’est pas facile de veiller à ce que les positions de nid soient les mêmes pour tous les couples. Il faut également savoir que tous les pigeons joués au naturel ne réaliseront pas des prestations, n’oublions jamais qu’il y a plus de mauvais que de bons pigeons.
Si on découvre dans son équipe des retardataires habituels, il ne faut plus les jouer. Il est néanmoins nécessaire, pour ne pas handicaper les partenaires de ces retardataires, de les laisser au colombier et de les traiter de la même manière que les autres pigeons. J’entends par là qu’il faudra les enlever du colombier au moment où les autres pigeons du même sexe seront enlevés, les laisser au colombier avec un jeune au moment où cela s’impose pour les autres pigeons du même sexe etc… Par contre lorsqu’on a un couple dont les deux partenaires sont médiocres on les écartera tous les deux du colombier. Lorsqu’on est confronté soit avec un nid démoli suite à une bagarre, soit avec des oeufs dont le couple ne veut plus après un éloignement trop prolongé du colombier (suite à une remise de lâcher) je conseillerais dans ce cas d’enlever le couple du colombier jusqu’à une prochaine tournée d’élevage. Il en est de même pour les pigeons qui ne rentrent pas d’un concours ou qui rentrent avec quelques jours de retard. Voilà une série de problèmes avec lesquels l’amateur qui joue au naturel sera confronté, des problèmes qui perturbent les positions de nid.
Le champ:
Les pigeons joués au naturel seront beaucoup plus attirés, surtout avec des jeunes dans le plateau, par le champ. Cela n’était pas très dangereux dans le temps, mais aujourd’hui, avec les engrais chimiques le champ devient notre ennemi numéro un. Je conseille donc vivement de veiller à ce qu’il y ait toujours du prit, de la pierre à picorer et du vitamineral dans le colombier où on joue au naturel. Je conseille également de donner plusieurs fois par semaine de la verdure: épinards, salade, choux frisés, chicons, carottes, ce sont des légumes que les pigeons aiment bien lorsqu’ils ont des jeunes dans le plateau.
Ne laissez en tout cas jamais aux pigeons joués au naturel, la liberté d’entrer et de sortir du colombier à leur guise. On les laissera uniquement sortir pour les volées d’entraînement. Il faut aussi éviter de prendre en mains un pigeon qui couve, par exemple pour l’obliger à faire sa volée. Si on fait cela quelques fois le pigeon quittera brusquement son casier dès qu’il vous voit entrer au colombier. La conséquence directe sera une certaine peur chez le pigeon et une perte de temps à la rentrée du concours.
Un pigeon ne doit pas nécessairement s’entraîner pendant la semaine pour réaliser une bonne prestation le dimanche.
L’alimentation:
Les pigeons joués au naturel doivent recevoir une nourriture en quantité suffisante et être nourris de préférence, deux fois par jour. Il faut néanmoins les garder sous contrôle. A la rentrée d’un concours tout comme le lendemain, je conseille de leur donner un mélange dépuratif avec de la levure de bière.
On remarquera que les parents qui ont des jeunes au plateau auront presque toujours faim, même s’il reste dans la mangeoire encore de l’orge. Après le mélange dépuratif on nourrira le mélange sport auquel je conseille d’ajouter deux à trois pour cent d’orge. Il peut y avoir toujours un peu d’orge dans la mangeoire, même entre les deux repas. Lorsqu’il en reste trop, on nourrira un peu moins, par contre si on remarque que la mangeoire est à chaque fois vide, on nourrira un peu plus. Ce qui importe, c’est que les pigeons, joués au naturel, reçoivent assez à manger mais il faut néanmoins veiller à ce qu’ils mangent tout, également l’orge.
Voici je crois, un système valable qui peut être appliqué avec succès.
André Roodhooft
Notices:
- Le plus important c’est de veiller à ce que les positions de nid de tous les couples restent les mêmes.
Il ne faut pas déranger ou enlever du nid un pigeon qui couve.
[ Source: Article édité par M. André Roodhooft – Revue PIGEON RIT ]
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