La circovirose, nouvelle maladie chez le pigeon
La circovirose s’attaque préférentiellement à des organes qui ne sont présents que sur le jeune pigeon. Mais, sur certains pigeons examinés, la rate était également infectée. Or, cet organe est présent quel que soit l’âge des oiseaux.
La circovirose est de découverte récente en France. Elle a été diagnostiquée pour la première fois en décembre 1998 dans un élevage de pigeons de chair. Depuis, nous retrouvons régulièrement cette maladie dans tous types d’élevages.
1. Les signes de la maladie:
Les signes de la maladie varient en fonction du type d’élevage.
1.1. Elevages type chair La maladie évolue sur plusieurs mois de façon récurrente. Elle touche l’une après l’autre chaque zone de l’élevage, disparaît dans un parquet et revient quelques semaines plus tard. L’éleveur détecte une mortalité au plateau de pigeonneaux âgés de plus de 15 jours et un taux de pigeonneaux chétifs anormalement élevés. Une flambée de coccidiose (diarrhée, nids sales), de trichomonose, de coryza, de capillariose (amaigrissement extrêmement important) de salmonellose (arthrite, mortalités brutales) est constatée sur les pigeonneaux au nid. Les jeunes futurs reproducteurs ont des troubles respiratoires, rarement de la diarrhée. Les reproducteurs sont peu touchés par la maladie. Parfois, on observe une recrudescence de la salmonellose (arthrites).
1.2. Pigeons voyageurs et pigeons de fantaisie Le signe principal est une mortalité souvent rapide de jeunes pigeons. La diarrhée peut précéder la mort. Parfois, très peu de pigeons sont atteints (1 ou 2), les autres pigeons ne montrant aucun signe de maladie. Parfois, la mortalité atteint 20 à 30% de l’effectif des jeunes. Ce sont essentiellement les pigeonneaux de moins de 6 mois qui paient un lourd tribut à la maladie. La maladie sévit pendant 2 à 4 semaines puis disparaît.
2. Le diagnostic
2.1. Sur pigeon vivant, les signes observés ne permettent pas de faire le diagnostic de la circovirose. Tout au plus, lors de mortalité rapide de jeunes pigeons, avec ou sans diarrhée, la circovirose peut elle être suspectée.
2.2. Sur un pigeon mort, une autopsie soignée permet d’observer une anomalie dans le développement de certains organes (rate et surtout, Bourse de Fabricius et thymus). Ces organes sont anormalement petits. Mais, d’autres maladies virales (paramyxovirus,…) provoquent également une atrophie de ces organes. En fait, seul l’examen microscopique des ces organes préparés selon un protocole rigoureux permet de confirmer la maladie. Cet examen n’est généralement pas fait « en routine »; seuls des laboratoires d’histologie réalisent cet examen sur prescription d’un vétérinaire. Le virus disparaît parfois des organes avant la mort.
L’examen d’un seul pigeon mort du circovirus peut donc être négatif. Quand cela est possible, il est donc préférable de réaliser l’examen sur plusieurs oiseaux. Ces difficultés du diagnostic peuvent expliquer le peu de cas décrits jusqu’à présent en France.
3. Mode d’action de la maladie.
3.1. Brefs rappels concernant l’immunité. Lors d’une contamination par un agent pathogène, l’organisme réagit en sollicitant son système immunitaire dont l’une des composante la plus connue est la production d’anticorps. Le temps de réaction de l’organisme varie en fonction des agents en cause. Il est de l’ordre de quelques semaines pour les bactéries et virus à quelques mois pour les parasites digestifs. Ce délai de mise en place de l’immunité explique pourquoi les jeunes pigeons sont bien plus vulnérables aux maladies que les adultes; ils n’ont pas encore eu le temps de s’immuniser naturellement ou à l’aide d’un vaccin.
Les organes qui sont le siège de l’immunité sont essentiellement la rate quel que soit l’âge et, pour les jeunes pigeons de moins de 6 mois, la bourse de Fabricius (organe situé à la base du cloaque) et le Thymus (organe situé tout le long de la trachée) Ces 2 organes disparaissent naturellement après l’âge de 6 mois.
3.2. Mode d’action du virus Le virus s’attaque préférentiellement aux cellules de la bourse de Fabricius et du thymus et parfois à celles de la rate. Les cellules meurent et l’organe s’atrophie. Il y a alors une grave défaillance du système immunitaire et le pigeon devient particulièrement sensible aux agents infectieux présents dans l’environnement. De plus, la vaccination d’un pigeon en cours d’infection par le circovirus peut être inefficace.
3.3. Les maladies associées En fait, le circovirus n’est pas directement responsable de la mort des pigeons puisque les organes touchés ne sont pas vitaux: l’infection circovirale peut passer inaperçue dans une colonie. Parfois, un seul pigeon va en mourir. Dans ce cas, le diagnostic est rarement établi puisque la recherche virale est rarement entreprise lors du premier cas de mortalité. Par contre, si dans l’élevage le microbisme est important, alors la maladie pourra être extrêmement virulente.
La passage viral permet l’éclosion de la trichomonose, des vers Capillaria, de la coccidiose, de l’aspergillose, de la salmonellose, de la colibacillose, de l’adénovirose. Mais surtout, l’association du circovirus et du paramyxovirus est la plus redoutable.
4. Prévention de la maladie.
La circulation du circovirus dans une colonie peut être extrêmement rapide. Nous avons pu retrouver le virus sur 15/15 pigeonneaux autopsiés dans un élevage ayant regroupé des jeunes de diverses origines. Les examens ont été réalisés moins de 1 mois après l’arrivée des pigeons. Le virus est donc extrêmement contagieux entre jeunes. Par ailleurs, le suivi d’un autre élevage ayant des caractéristiques similaires (regroupement récent de pigeonneaux d’origines diverses) a permis de détecter le virus sur un seul pigeon alors que les autres pigeons sont restés parfaitement sains. La circulation virale dans une colonie n’entraîne donc pas toujours la maladie visible. ll est donc possible de prévenir la maladie due au circovirus.
4.1. Action contre le virus Il n’y a pas de vaccin disponible et il n’y a pas de traitement agissant directement contre le virus quand la maladie est en évolution. Il faut donc en priorité empêcher le virus d’entrer dans l’élevage par des mesures d’hygiène strictes.
4.1.1. Mise en quarantaine des pigeons nouvellement introduits, des pigeons étrangers à la colonie, des pigeons perdus,…
4.1.2. Nettoyage et désinfection des paniers servant au transport,…
4.2. Action contre les autres agents Nous l’avons vu, l’évolution de la maladie dépend essentiellement des autres agents infectieux présents dans la colonie. C’est sur ces agents qu’il faut agir spécifiquement:
4.2.1. Une alimentation équilibrée, bien pourvue en vitamines et en oligo éléments permet d’obtenir des oiseaux plus résistants
4.2.2. Les nettoyages quotidiens du colombier permettent de limiter le parasitisme intestinal.
4.2.3. Une bonne aération limite l’apparition du coryza.
4.2.4. Le programme de vaccination contre la paramyxovirose et la salmonellose doit être irréprochable. Nous l’avons vu, le circovirus peut nuire à la bonne prise vaccinale. Une double vaccination des pigeonneaux contre la paramyxovirose permet d’y pallier. La première vaccination est réalisée très précocement après le sevrage. Une deuxième injection est réalisée 1 à 3 mois plus tard. Ainsi, au moins l’une des injections sera réalisée sur un pigeon parfaitement immunocompétent.
5. Prospectives et Questions posées par cette maladie
5.1. Statistiques
Nous ne diagnostiquons la maladie que depuis mai 1999. Avant cette date, nous ne faisions pas la recherche du circovirus: nous ne pouvions donc pas le trouver! De mai 99 à décembre 99, nous avons détecté 7 élevages contaminés sur 22 soumis à l’analyse. De janvier à juillet 2000, nous en avons observé 12 cas sur 15 soumis à l’analyse! De tels chiffres semblent indiquer que la maladie est en extension actuellement en France.
5.2. Absence de maladie sur les adultes?
Les adultes semblent réfractaires à la maladie. Nous n’avons jamais isolé le virus sur des pigeons âgés de plus de 6 mois. Le virus s’attaque préférentiellement à des organes qui ne sont présents que sur le jeune pigeon. Mais, sur certains pigeons examinés, la rate était également infectée. Or, cet organe est présent quel que soit l’âge des oiseaux. Des pigeons adultes peuvent donc probablement héberger le virus. Peuvent-ils en être malades? Peuvent-ils transmettre le virus?
Depuis juillet 2000, la maladie semble s’estomper. Va-t-elle réapparaître avec le début des concours? Nous avons observé combien la maladie était contagieuse entre jeunes pigeons. Si la maladie s’étendait au niveau national, faudrait-il supprimer les concours de pigeonneaux de moins de 1 an? Avant de prendre une solution aussi radicale, il convient de s’assurer que le protocole de vaccination contre la paramyxovirose est bien respecté par l’ensemble des amateurs.
[ Source: Article édité par Dr. Vét. Bernard Lefebvre – Revue PIGEON RIT ]
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