31 juillet 2022 Par admin

La folie de l’impatience – pigeon voyageur

Débutant:
Tu m’as dit un jour que l’impatience, dans la vie actuelle, empêchait de vivre vraiment, et que même en colombophilie cela pouvait se vérifier. Mais le progrès ne va-t-il pas de pair avec la « vitesse ». C’est du moins ce que l’on constate actuellement. Un exemple: quel progrès le T.G.V. (train à grande vitesse) n’a-t-il pas fait par rapport aux « vieux » trains… qui ne roulaient « qu’à » 140 km à l’heure! Le T.G.V. lui file à près de 300 km à l’heure… quel gain de temps!
C’est le progrès, et on ne l’arrêtera pas! Plus vite, toujours plus vite… on gagne du temps…

Victor:
Oui, mais « quel » temps! Le progrès, cher ami, n’est pas une question de gagner des minutes, mais une question de qualité de vie. Une vie « hâtive » serait-elle plus agréable à vivre qu’une vie « relax » comme on dit?

Débutant:
En colombophilie, c’est une autre question….

Victor:
Je vais te raconter un bout d’histoire du meilleur champion que la Belgique ait connu avant la deuxième guerre mondiale, le docteur Arthur Bricoux de Jolimont. La « hâte » était son grand ennemi, et la « patience » son grand allié dans les fabuleux résultats qu’il a remportés.

Débutant:
Et moi qui croyais que seulement la qualité supérieure de ses pigeons pouvait justifier ses résultats extraordinaires!

Victor:
Il est certain que le Dr Bricoux possédait de très bons pigeons. Mais il y avait des centaines de colombophiles dans son cas en Belgique… et la question qu’on doit se poser est la suivante: pourquoi le Dr Bricoux leur était néanmoins supérieur?
Pour une grande part sa supériorité résultait de sa façon de jouer ses pigeons. Ses résultats mirobolants il les a remportés avec des pigeons âgés de 3, 4, 5, 6 et 7 ans. Ces pigeons avaient une carrière sportive très longue. Cela devient de plus en plus rare. Combien de pigeons rencontre-t-on actuellement encore dans les résultats, des pigeons âgés de 4 à 7 ans, des pigeons avec une carrière sportive de cinq ans? Ils sont extrêmement rares. Et pourquoi?

Débutant:
Donne-moi son système, ce n’est pas un secret pour toi.

Victor:
Et pourtant, sans être un secret, son système est difficile à appliquer avec la mentalité actuelle…

Débutant:
Quelle mentalité?

Victor:
Je te l’ai déjà dit: les colombophiles, comme nous tous, sont entraînés par le siècle de la vitesse… ce progrès qui n’en est pas un. Mais, comme le disait Blaise Pascal: » Nous sommes tous tellement fous qu’il faut être fou d’un autre tour de folie pour n’être pas fou! »

Débutant:
Et quel est cet autre tour de folie.

Victor:
C’est d’avoir la folie de ne pas faire comme tous les autres fous. On passerait alors pour un détraqué. Et le colombophile qui agirait comme le docteur, on dirait de lui qu’il est un rétrograde, qu’il n’est pas de son temps, quelqu’un qui ne suit pas le progrès. Or le progressisme est à la mode! Mais quel progressisme?
Un progressisme qui nous fait croire que la qualité de la vie se résume à quelque chose de purement physique… alors qu’il y a dans l’homme autre chose que le physique seul!

Débutant:
Avec ta manie de philosopher je n’ai encore rien appris du système Bricoux.

Victor:
J’y viens. A la base de ses succès, il y a certainement le fait que le Dr Bricoux était un bon connaisseur de pigeons. Il triait ses pigeonneaux en main, non sur les résultats, puisqu’il ne jouait pas ses jeunes. Pour le docteur un pigeon devait avoir en main l’apparence d’une poire, d’autre part un plumage soyeux pour glisser dans l’air sans qu’on l’entende voler. Avoir une aile « proportionnée » à son gabarit. Si le pigeon lui tombait bien en main, il était joué comme yearling, au naturel, sur des petites étapes, simplement comme entraînement. Leur classement, me disait-il, ne m’intéresse pas, pourvu qu’ils rentrent dans un état de fraîcheur parfaite. L’instinct d’orientation se développe avec l’âge, avec l’acquis de l’expérience, comme tous les instincts.
A l’âge de deux ans, ils vont au veuvage et voyagent assez peu, mais jusqu’au Derby (600 km) seulement.
A l’âge de 3 ans commence alors leur vraie carrière sportive qui peut durer cinq années. Il est rare qu’il y en ait alors un qui me déçoive par ses mauvais résultats.
Ce système me permet de me contenter de 80 pigeons, tout compris!

Débutant:
Crois-tu vraiment qu’on puisse encore faire de même aujourd’hui? J’en doute car les soi-disant grands champions possèdent actuellement des centaines de pigeons… ou bien la qualité moyenne de nos pigeons actuels aurait-elle diminuée, pour qu’on soit obligé de tenir tant de pigeons pour bien se défendre?

Victor:
Pas nécessairement. Mais ce que je crois, c’est que les pigeons à l’époque des Bricoux, Duray, Havenith et d’autres encore, étaient plus robustes de santé. Que leur résistance naturelle était encore moins handicapée par tous les médicaments que les pigeons absorbent actuellement.
J’ai dit un jour que je considérais l’assistance par des médicaments plus dangereuse pour le genre humaine que la bombe atomique. Pour les pigeons cela se vérifie de plus en plus.
Notre irresponsabilité consiste à dire « cela tiendra bien le temps que nous vivons I » Ce sera le mot de la fin…

Débutant:
Mais quelle fin?

Noël De Scheemaecker

Notices:

Le Dr. Bricoux était un bon connaisseur de pigeons. Il triait ses pigeonneaux en main, puisqu’il ne jouait pas ses jeunes. Ses pigeons devaient avoir en main l’apparence d’une poire, avec un plumage soyeux et une bonne aile. Comme yearling, les pigeons étaient joués au naturel. A l’âge de deux ans ils étaient joués au veuvage.
Le grand secret du Dr. Bricoux était son système de jeu. La carrière sportive de ses pigeons était de 3 à 7 ans. Puisqu’on vit dans un monde plein « d’impatience », il est difficile d’appliquer son système avec la mentalité actuelle.

[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ]