La maladie des yeux de pigeons
20 novembre 2021 Par admin

La maladie des yeux de pigeons

La maladie des yeux de pigeons

Chaque saison, en particulier lorsque viennent les premières chaleurs, on trouve soudain au colombier, un pigeon – souvent un pigeonneau – avec l’oeil gonflé, larmoyant, purulent dès le lendemain. « Tiens, il a pris un coup de bec », dit l’amateur optimiste. Mais les jours suivants, d’autres cas apparaissent. Alors fini la thèse du coup de bec. En fait, il s’agit du syndrome (c’est-à-dire un complexe atteignant une région et dont les causes sont multiples) « coryza ». Ce coryza sous ses diverses formes, plus ou moins nettes, plus ou moins aigües, est la plaie moderne de la colombophilie. Une crise violente dans le colombier met les pigeons hors de combat pour 2 ou 3 semaines; l’existence d’un coryza chronique (peu apparent) rend tout résultat valable impossible, en particulier à bonne distance et par temps chaud. La « maladie des yeux » est donc la forme aigüe de ce coryza. On sait que la région « nez – gorge – oreilles » est d’une extrême complexité anatomique: la bouche communique avec le nez par l’intermédiaire de la fente palatine, le nez communique avec l’oeil par l’intermédiaire des sinus et du canal lacrymal. Le tout avec les oreilles par les trompes d’Eustache.



Connaissant ces relations anatomiques, les choses vont devenir plus faciles à suivre. Premier responsable: le trichomonas. L’examen microscopique de la salive d’une « maladie des yeux » montre qu’elle est bourrée de trichomonas. Il y en a en général plus que de salive. Ces parasites remontent peu à peu de la gorge, leur lieu de prolifération habituel, franchissent la fente palatine (qu’ils font se fermer par l’inflammation qu’ils provoquent) et gagnent les fosses nasales, les sinus.
Même réaction inflammatoire des sinus, le canal lacrymal se ferme, les larmes ne s’évacuent plus par cette voie naturelle: le pigeon pleure.
Tous les êtres vivants sont porteurs de germes dits « saprophytes » qui vivent avec lui, dans différents lieux de son individu: colibacilles dans l’intestin, germes microbiens divers dans sa bouche, microbes et virus dans les fosses nasales etc. etc. Ces germes sont inoffensifs parce qu’ils sont tenus en respect par les réactions de défense de l’organisme, l’équilibre chimique du milieu etc. Mais que cet équilibre se modifie, que les défenses organiques baissent, les hôtes inoffensifs deviennent virulents, dangereux. Et chose plus grave, cette virulence est transmissible, contagieuse. Sur un autre pigeon, ils seront capables aussi de créer des désordres même si le nouvel hôte a de bons moyens de défense. De là, l’extension du mal, d’autant que les pigeons vivant dans le même local, connaissent en général les mêmes causes d’amoindrissement de leurs moyens de défense, les pigeonneaux sont, de par leur âge, moins résistants. De plus une équipe connaît les mêmes fatigues, la même nourriture, le même local (qui peut devenir un habitat médiocre dans certaines circonstances atmosphériques: chaleur, variation de la direction du vent, variation hygrométrique, sureffectifs).



Les germes devenus dangereux doivent évidemment être combattus. Les plus fréquents sont les staphylocoques blancs ou dorés (pas meilleurs pour autant), les entérocoques, les colibacilles, les Klebsielles, les mycoplasmes. Enfin, les travaux du professeur Vindevogel ont montré la fréquence d’un virus spécifique (herpes virus) associé. Cela fait beaucoup de monde. C’est dire que le traitement valable va devoir être très large. En ce qui concerne l’herpes virus, on est actuellement désarmé contre lui. Une vaccination sera peut-être possible dans quelques années mais le problème semble encore loin d’être résolu sur le plan de la médecine pratique. Il reste encore 6 germes différents – au moins – possibles et chaque souche a des sensibilités variables à tel ou tel antibiotique.
On entend souvent un amateur dire à un autre « moi, je mets tel produit dans l’eau, ça marche du tonnerre ». Et l’autre d’essayer, sans succès. Tout simplement parce que les germes de l’un sont sensibles à ce produit et ceux de l’autre pas. Le produit n’y est pour rien et sa qualité n’est pas en cause. Tout ce qu’on peut dire, c’est que certains antibiotiques ou associations antibiotiques sont efficaces dans une majorité de cas et d’autres beaucoup moins souvent. Alors il faut d’abord employer les premiers et si ça ne suffit pas, en employer d’autres. On est condamné à jouer à la loterie. Seule une recherche bactériologique de laboratoire avec antibiogramme peut limiter les risques mais n’est cependant pas absolue pour des raisons toujours possibles de résultats fragmentaires ou d’emploi inadapté (par ex. certains antibiotiques sont inefficaces par le bec). Un certain nombre de règles dominent tout de même pour un traitement efficace: il comprendra obligatoirement un antitrichomonas, il y associera s’il le faut un traitement contre les autres parasitismes intestinaux dont on sait la colonie porteuse (un examen de fientes par le vétérinaire est toujours utile).
L’administration d’antibiotiques efficaces par la seule eau de boisson est généralement insuffisante, même à haute dose et assez longtemps. L’instillation de gouttes calmantes et désinfectantes 2 fois par jour aux « malades des yeux » dans les yeux et les narines est toujours recommandée.
Mais l’éradication n’est vraiment obtenue que lorsque ce traitement général est complété par 2 piqûres d’antibiotiques actifs à 24 h d’intervalle. Ce traitement (eau de boisson + piqûres) doit être fait à la totalité des pigeons, au moins du même colombier. Sinon les rechutes vont suivre, systématiquement, obligeant à de nouveaux traitements et aux pertes de temps consécutives. Tandis qu’un traitement complet mené énergiquement et avec logique ne provoquera qu’un arrêt d’un dimanche.
Bien sûr, il faudra modifier le colombier. C’est souvent le plus difficile car il faut avoir la notion de ce qui ne va pas de ce côté. Certains colombiers excellents par temps normal, deviennent insuffisants par grosse chaleur. Question de mouvement d’air souvent, celui-ci étant assuré soit par le vent entrant par les aérations soit par la différence de température entre le sol et le toit. Un vent qui tourne, une forte chaleur qui augmente les besoins respiratoires des pigeons, tout cela constitue la cause favorisante qui permet l’apparition aigüe du mal. Le colombier modulable parfait n’est encore qu’un heureux hasard.

Dr. Vét. J.P. Stosskopf


Notices:

  • L’examen microscopique de la salive d’un « malade des yeux » montre qu’elle est bourrée de trichomonas. Ces parasites remontent peu à peu de la gorge, leur lieu de prolifération habituel, franchissent la fente palatine (qu’ils font se fermer par l’inflammation qu’ils provoquent) et gagnent les fosses nasales, les sinus.
  • La région « nez – gorge – oreilles » est d’une extrême complexité anatomique: la bouche communique avec le nez par l’intermédiaire de la fente palatine, le nez communique avec l’oeil par l’intermédiaire des sinus et du canal lacrymal. Le tout avec les oreilles par les trompes d’Eustache.
  • Certains colombiers excellents par temps normal, deviennent insuffisants par grosse chaleur.

[ Source: Article édité par Dr. J.P. Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]

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