La musculature et l’aile de pigeon
Débutant :
Crois-tu qu’une bonne musculature soit indispensable pour que le pigeon puisse bien se classer? J’ai eu en mains des pigeons qui avaient peu de muscles, et qui pourtant étaient des champions?
Victor :
Ce que tu dis là est absolument impossible. Tu sais qu’aucun mouvement du corps n’est possible si le muscle ne travaille pas. Tu dois comprendre que plus le mouvement se prolonge et plus il est pénible, plus le muscle sera mis à l’épreuve. Le pigeon qui a peu de muscles perd en endurance mais surtout en puissance de vol.
Débutant :
Et pourtant j’ai eu en mains des pigeons qui n’avaient pas le long du bréchet une musculature rebondie, mais qui me donnaient l’impression d’être assez décharnés. Or la chair c’est le muscle, donc peu de chair, peu de muscle.
Victor :
Je vois où tu te trompes. Et pour mieux t’expliquer ton erreur je te raconte la discussion que j’ai eue avec Jef Van Riel et son fils François.
François nous disait qu’il aimait les pigeons un peu profond, c.-à-d. les pigeons avec un bréchet descendu, à condition que ce dernier soit assez long. Ces pigeons donnent à première vue, disait-il, l’impression qu’ils sont peu musclés, mais cela tient à la forme de leur «carcasse». Des pigeons ronds, mais assez plats, sont souvent bien moins musclés que les premiers. Ceux-ci ont un corps qui a la forme d’un triangle équilatéral, et les muscles collés aux deux côtés qui descendent vers le bréchet sont généralement plus épais et plus longs que ceux de pigeons «ronds» et plutôt «aplatis».
Les pigeonneaux donnent, les premiers mois surtout, quand on les prend en mains, l’impression d’avoir peu de muscles, mais, par après, ils se rembourrent les flancs, et si tel est le cas, on a souvent à faire à un champion.
Jef Van Riel fit lors la remarque suivante à son fils : ce qui tu dis est souvent vrai, mais il ne faut pas généraliser. J’ai eu de très bons pigeons parmi ceux qui avaient le corps apparemment assez plat. Ce qui compte alors c’est le volume des muscles. Un petit pigeon n’a pas besoin de tant de muscles — songer au «Zotteke» p.ex. —mais si on avait pu mettre à nu sa carcasse, on aurait sans doute constaté qu’elle n’était pas aplati du tout.
Débutant :
Pour juger de la musculature d’un pigeon, il ne faut donc pas se fier aux apparences? C’est bien cela qu’on peut conclure de ce qui précède?
Victor :
Exactement. Mais en fait les muscles pectoraux du pigeon à quoi servent-ils? A actionner les ailes. Si tu manges un pigeon, ou une poule on n’importe quel oiseau, tu remarques deux tranches de viande superposées le long du bréchet — chez le poulet on appelle cela «le blanc». Ces deux tranches de muscles servent, l’une à remonter l’aile, l’autre à la descendre. Ils travaillent à une cadence inouie pendant le vol, et de ce fait fondent progressivement au fur et à mesure que le vol se prolonge.
Il faut avoir eu en mains des super-cracks, qui durent pendant six ans, pour se rendre à l’évidence qu’une bonne aile sans muscles excellents ne sert à rien, et, vice-versa, que des muscles puissants, c.-à-d. longs, épais et souples, ne servent pas à grand chose si l’aile est médiocre.
Débutant :
Mais quelle est la différence essentielle entre une bonne aile et une aile médiocre?
Victor :
C’est la logique même si tu réfléchis à ce que je viens de dire. C’est une question d’équilibre entre la puissance de l’aile, comme élément propulsif, et la capacité de l’actionner.
L’aile est puissante si elle est épaisse, bien formée, c.-à-d. «fermée» par en dessous, et si les plumes qui font avancer le pigeon, c.-à-d. les quatre dernières sont suffisamment longues et souples. Or ces plumes sont souples quand elles ne sont pas trop larges à la base et trop étroites aux extrémités. Une plume de poule est l’exemple typique de l’oiseau qui a du mal à voler. Mais tout cela doit être examiné en fonction de l’équilibre entre aile et musculature. Plus le pigeon a du poids, plus la surface portante (l’arrière aile l doit être grande. Mais l’étendue de la surface portante est, en soi, un handicap à la vitesse du pigeon. Quand la surface portante diminue, la vitesse augmente dans la même proportion, mais à condition que le pigeon ne se fatigue pas par le fait de la pesanteur, dû à son poids. Un pigeon lourd n’est pas un pigeon de fond qui peu durer des années.
Débutant :
Je crois donc comprendre qu’un pigeon de vitesse peut être plus lourd parce que l’effort demandé n’est pas si long, et que coeur et poumons peuvent supporter cet effort assez court.
Victor :
En effet, en règle générale c’est exact, mais il y a tant d’autres éléments qui peuvent intervenir, et que nous ne connaissons pas suffisamment, mais qui justifient les exceptions à la règle. Il y a p.ex. l’adaptation de certains organismes et qui parviennent à neutraliser tel ou tel handicap de vol.
Débutant :
Je comprends maintenant que, tout comme la médecine, la science colombophile n’est pas un science exacte, comme les mathématiques.
Victor :
C’est pour cela qu’on se trompe par-fois quand on juge de la valeur d’un pigeon. Mais ce que nous savons encore de l’aile c’est que le vol est facilité par la souplesse des articulations et de la musculature. C’est donc important pour le pigeon de fond.
Débutant :
Cela je le comprends très bien, car il en est de même pour tout athlète.
Victor :
Outre la souplesse — sur laquelle on peut se tromper quand le pigeon est contracté —souvent à la suite de la frayeur — ii y a encore la qualité de plumage. Celle-ci est un élément important pour la pénétration dans l’air. Elle va souvent de pair avec une santé parfaite. Chez un pigeon dont la forme monte on constate fort bien que le plumage devient encore plus soyeux. A ce moment il peut jouer un rôle important, car il maintient la capacité calorifique du pigeon. Et cela est capital pour la durée de la forme.
Débutant :
Il faudrait donc aussi baser sa culture sur des pigeons avec un plumage soyeux? Ils seront plus facilement en forme?
Victor :
Tu exprimes là, mon cher ami, une des grandes vérités de base pour réussir en colombophilie.
[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ]
Pour vous abonner au Magazine PIGEON RIT – Cliquez sur le bouton ci-dessous !
La musculature et l’aile des pigeons
Le standard, l’aile et les accouplements – pigeon voyageur