La propriété des pigeons voyageurs
Il est dans l’instinct de la plupart des animaux d’avoir un endroit où il peut se reposer, élever ses jeunes, voire se défendre et préserver sa survie. Cela peut s’étendre pour certains animaux tels que les fauves, ou les rapaces à des « territoires » de plusieurs kilomètres carrés. C’est même vrai pour les animaux vivant en colonie, le territoire devenant celui de la colonie tout entière (par exemple la fourmilière) où tout étranger court un danger mortel. Alors pourquoi voulez vous que les pigeons échappent à cette règle? On a souvent écrit que la défense de la case, de la nichette, et même du perchoir était une des conditions de l’attachement du pigeon voyageur à son colombier. Il faut y ajouter la sexualité et ses corollaires: le nid, les veufs, les jeunes au plateau. Tout cela fait les conditions de base dans l’exploitation d’une colonie. Si la devise: « une case pour chacun »est la base de l’affaire, encore faut-il savoir s’y prendre. Il ne suffit pas de mettre dix mâles et dix femelles dans un colombier de dix cases pour que cela s’arrange tout seul. On peut même dire que faire comme cela réserve pas mal de difficultés, batailles en tous genres, prise de plusieurs cases pour un seul, pontes par terre, oeufs cassés etc. Si on veut que tout se passe aussi bien que possible, il faut d’abord préparer le colombier: il n’y a plus de pigeons dedans. On le nettoie à fond, on le désinfecte (il existe maintenant des désinfectants puissants, sans danger pour les pigeons et des insecticides qui élimineront araignées, mites, tiquets, poux des pigeons etc. pendant plusieurs mois). Les plateaux sont enlevés, lavés, désinfectés et stockés au sec. Chaque case est fermée. Quand on met des pigeons dans ce colombier, on ne met que les mâles. Si certains y étaient précédemment, on ouvre la case qu’ils occupaient précédemment, ou plutôt la demi-case, la partie où sera le plateau leur restant interdite, comme les cases non occupées. Donc autant de cases ouvertes que d’anciens, pas plus. Toutes les autres, fermées complètement. Quelques jours plus tard, on introduit les nouveaux mâles: chacun une case, pas plus, et ouverte à moitié, comme indiqué ci-dessus. Chaque case comportera une petite mangeoire, où chaque mâle recevra son repas. Peu à peu, chaque pigeon ira à la même case pour manger, puis reposer.
Ainsi va se développer l’instinct de propriété. Les pigeons préfèrent les cases en hauteur. Il sera donc bon de réserver une case haute aux meilleurs d’entre eux. Ils ne la défendront que mieux. Il faut environ un mois pour que tout soit prêt pour l’accouplement. La présentation des femelles découplées depuis un bon moment (au moins 3 à 4 semaines) et bien nourries en vue de l’accouplement (petites graines, légumineuses, vitamines et minéraux) crée un remue ménage important au colombier des mâles célibataires forcés. Chaque femelle prévue pour chaque mâle sera mise dans la partie fermée de la case et laissée enfermée. Ainsi seront évitées des bagarres dans les couples nouveaux avec parfois des graves blessures (têtes et yeux en particulier). Mâle et femelle font ainsi connaissance à travers des barreaux protecteurs. Ce n’est que lorsque l’accord sera manifeste que l’autre moitié de la case sera ouverte, donc accessible au couple. Quelques jours plus tard, on y déposera un plateau et des brindilles de paille ou de tabac qui seront laissées à disposition au colombier. La ponte va confirmer la propriété puis, bien sûr, la naissance des pipants. Beaucoup de lecteurs penseront certainement que tout cela, c’est le B.A. de la colombophilie. Peut-être, quand on le fait après y avoir quelque peu réfléchi. Car, que va-t-il se passer si la pagaille s’installe dans le colombier: femelles qui pondent par terre, mâles ayant pris deux cases au détriment d’autres. Ces derniers, quelle que soit leur valeur sportive vont se perdre au premier concours un peu dur. Certes celui qui a pris deux cases va, si c’est un bon, se distinguer d’autant mieux. Pourquoi? L’instinct de propriété va l’obliger à surveiller la case supplémentaire qu’il s’est attribuée, celui qu’il a évincé cherchant à y retourner (avant de se perdre à la première occasion). Alors comment éviter tout cela? Lorsque tout le monde est tranquillement entrain d’élever son ou ses jeunes, chacun dans sa case, et s’apprête à y recouver, on introduit dans le colombier un mâle « en plus », célibataire depuis un moment, et si possible d’une couleur vive: un blanc, un meunier par exemple. Et ce mâle va chercher à se « caser » au sens exact du terme. Perché où il peut pendant la nuit, il va dès l’aube aller roucouler dans l’une ou l’autre case, essayer de conter fleurette à quelques femelles pendant que leur mâle couve. Ainsi multiplie t’on l’instinct de propriété, la jalousie au colombier, pour le plus grand bien des résultats sportifs. Ce pigeon ne sera pas joué, mais éloigné du colombier quand les autres seront partis. Par la suite, la même technique présidera dans la gestion du colombier. Lorsqu’un pigeon se perd, sa case sera fermée en attendant son retour. S’il ne revient pas, après un certain temps, on pourra éventuellement la mettre à la disposition d’un voisin valeureux qui aura ainsi deux cases à défendre. Le surnuméraire sera alors le temps nécessaire, tenu éloigné du colombier. Comme on le voit, il s’agit d’entretenir une « jalousie de territoire », différente de la jalousie sexuelle et à mon avis, beaucoup plus efficace. Car, quoi qu’on en ait dit, la sexualité joue un rôle moins important dans le rendement du pigeon. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas s’en servir dans la préparation de nos pigeons. En plus.
Doct. Vét. J.P.Stosskopf
Notice :
- Il est dans l’instinct de la plupart des animaux d’avoir un endroit où il peut se reposer, élever ses jeunes, voire se défendre et préserver sa survie. Mais attention, il ne suffit pas de mettre dix mâles et dix femelles dans un colombier de dix cases pour que cela s’arrange tout seul. Non, le colombophile doit s’y prendre d’une manière bien réfléchie.
[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P.Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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