11 décembre 2020 Par admin

La Soif des pigeons voyageurs

La Soif Des Pigeons Voyageurs

La soif, c’est la réaction nerveuse à la déshydratation de l’organisme. C’est un phénomène d’une grande complexité. Le corps reçoit de l’eau de trois organes. D’abord bien sûr, l’abreuvement. Un pigeon de 500 gr absorbe, pour lui seul, et à température ambiante moyenne (env. 18° C), environ 50 ml d’eau de boisson. Ensuite de l’alimentation solide: les graines en contiennent environ 10 %. Sans compter la verdure etc…. consommée volontiers. Enfin à l’intérieur même de l’organisme, certaines réactions de dégradation produisent de l’eau. Par exemple, la transformation des graisses de réserve en énergie provoque la formation d’eau (et de gaz carbonique, évacué par la respiration). Le corps utilise de l’eau dans de multiples phénomènes organiques; la digestion ne peut se faire que si la ration est diluée dans une bonne quantité d’eau dans laquelle les éléments nutritifs sont soit dissous soit en fine suspension. Au niveau de l’intestin grèle, ces principes nutritifs traversent la paroi intestinale et gagnent la circulation sanguine (l’extérieur de l’intestin d’un pigeon en cours de digestion est parcouru par de nombreux fins vaisseaux sanguins). Le résidu, c’est la partie intestinale de la fiente (la partie urinaire est blanche), elle-même riche en eau (50 %) même si elle est normale. Diarrhéique, elle est encore beaucoup plus aqueuse.
La respiration exporte beaucoup d’eau sous forme de vapeur d’eau, formée au niveau des alvéoles et des parois des sacs aériens. Enfin certaines réactions chimiques organiques consomment de l’eau (ne serait-ce que la formation des oeufs 65 à 70 % de leur poids soit 22 à 25 gr).
Si le corps du pigeon est bien isolé par le plumage, donc relativement peu sensible à la température extérieure, et puisque le pigeon ne sue pas (faute de glandes sudoripores) l’exportation accrue de l’eau par temps très chaud se fait uniquement par la respiration. Entre 15 et 30′ C de température extérieure, les besoins en eau se trouvent doublés. Le dessèchement se fait très rapidement sentir au niveau des premières voies respiratoires et crée la « soif de gorge » toujours mal supportée. Le travail du vol augmentant le rythme respiratoire, le dessèchement est encore plus rapide au cours du vol de retour et cela amène le pigeon à rechercher un point d’abreuvement lors des concours de fond par temps chaud. Selon l’expérience et la volonté de retour du pigeon, cela peut prendre 30 secondes ou… plusieurs heures. Ce problème de l’abreuvement au cours du vol de retour a amené les amateurs à rechercher un moyen pour éviter cet « arrêt canette ». On a donc préparé des pilules à base d’atropine (une poudre de belladone d’où est extraite l’atropine). Faut-il dire que dans l’énorme majorité des cas, l’effet est strictement illusoire et cela pour 2 raisons.
La première c’est que, dans les concours de fond, le séjour au panier est toujours long, le plus souvent 3 nuits de panier. Tous ceux qui ont pris des granules d’atropine savent que l’effet antisecrétions est obtenu dans l’heure qui suit. Nous sommes loin des 3 jours.
Même si on a des dragées très enrobées, aucune ne résiste au broyage dans le gésier et c’est tout au plus quelques heures après l’enlogement que l’effet sera obtenu. Et il dure au plus quelques heures.
La seconde, c’est que la soif est la conséquence de la déshydratation. L’atropine supprime passagèrement la sensation de soif, elle ne supprime pas la déshydratation et tout ce que ce manque d’eau organique entraîne. On ne conçoit pas un effet durable d’un organisme déshydraté. Alors, inutile de croire aux pilules anti-soif. La première chose à faire pour n’en pas avoir besoin est d’apprendre, dès leur jeune âge, à boire au panier. 80 % des pigeonneaux entraînés ne le savent pas.
La teneur du sang en eau est une constante. Toute déshydratation du sang entraîne la soif. Mais en cas de déséquilibre, en particulier minéral, la soif apparaît car l’organisme tente alors de réequilibrer la teneur minérale du sang en absorbant de l’eau claire. La consommation en excès de sel par exemple (au moment de l’élevage) fait monter la teneur en sel du sang au-delà de la normale (9 gr par litre), donc crée le besoin en eau. Le pigeon boit en surabondance jusqu’à retrouver un sang normal. Puis renvoie l’excès par ses reins (qui risquent fort d’en être lésés): c’est une diarrhée inondante. Il en est de même avec les engrais granulés, avec en plus une grande toxicité dont pâtissent plus ou moins gravement foie et reins.
Dans la paramyxo, on a une soif intense, d’une toute autre origine: l’inflammation violente des voies digestives. Le pigeon cherche à « éteindre le feu » qu’il ressent en lui. Cette eau est immédiatement rejetée, inondante. Dans ce cas, on ne peut guère dire qu’il s’agit d’un problème d’équilibre en eau de l’organisme.

Doct. Vét. J.P.Stosskopf

Notices :

Un pigeon qui vole, a un rythme respiratoire plus élevé. Il en résulte un dessèchement plus rapide. Le pigeon qui vole durant de longues heures sera obligé de s’abreuvoir à un certain moment.
Certains amateurs croyent que le problème de la soif peut être résolu par une pilule (anti-soif ) à base d’atropine donnée au pigeon au moment de l’enlogement. C’est une utopie. L’atropine supprime passagèrement la sensation de soif, mais elle ne supprime pas la déshydratation.
Il faut apprendre aux pigeonneaux dès leur jeune âge â boire au panier. Cela évitera bien des problèmes de soif chez ces jeunes athlètes. Pour le faire il suffit par ex de placer pendant quelques jours les jeunes dans un vieux panier de voyage auquel on accroche un abreuvoir.

[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P.Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]