Laile et le vol 2 – pigeon voyageur
3 juin 2020 Par admin

L’aile et le vol (2) – pigeon voyageur

Laile et le vol 2 – pigeon voyageur

III. Vitesse de vol.

La vitesse du vent est moindre près du sol que dans les couches d’air hautes. Ceci s’explique par les frottements suite aux inégalités de la surface du sol. C’est donc pourquoi le pigeon voie le plus près possible du sol par vent de face (pour profiter d’une résistance moindre de l’air) et s’élève par vent arrière profitant ainsi d’un soutien maximum dans le dos. Ces constatations peuvent paraître banales. Il faut cependant toujours y revenir, car il arrive encore que des affirmations erronées soient énoncées. Ainsi certains chroniqueurs affirment que le retour des pigeons est plus facile par vent de face (se référer à ce que j’ai écrit dans la préface « Envol ») et il est parfois affirmé que le pigeon monte très haut • pour trouver la zone ( à 250-300 m) par temps calme) ou la tension électrique pourrait atteindre 25000-30000 volts.
Cette tension devrait être créée par les frottements du corps contre le vent et permettrait au
pigeon d’employer les ondes pour s’orienter.
Cela ne correspond pas aux « théories scientifiques sur l’orientation du pigeon. Cela ne va vraiment plus du tout lorsqu’on ajoute ceci: « par vent de sud le frottement est trop faible, de sorte que les pigeons sont obligés de prendre de l’altitude pour atteindre une tension complète alors que par vent de – nord le frottement étant trop fort, les pigeons doivent voler plus bas ». Que se passe-t-il, dès lors, lorsque les pigeons sont lâchés au nord de leur pigeonnier? Parce qu’alors le vent du nord est un vent de dos et le vent de sud un vent de face!
Je ne puis terminer ce chapitre sans vous parler de ce que l’on nomme la ligne aérodynamique. La structure corporelle avec tous ses éléments: les plumes collées au corps, tout ce qui fait « arrondir les angles » (particulièrement lorsque les pigeons sont en forme), les pattes repliées sous la queue, tout ceci concorde à donner au pigeon une ligne aérodynamique.
Or, l’aérodynamisme diminue la résistance de l’air, supprime les turbulences et offre la possibilité, dans certaines conditions, de voler de la manière la plus économique, c’est-à-dire à la plus grande vitesse et le plus loin possible sans fatigue.



IV. Muscles pectoraux et muscles alaires

Le mouvement des ailes met en branle de nombreux muscles. Les principaux sont les deux muscles pectoraux: le grand pectoral (le muscle de surface) celui qu’on peut palper; le plus petit, le muscle pectoral profond ou muscle supracoracoïde. Entre les deux se trouve un prolongement du sac aérien de l’épaule (voir les articles sur la respiration). Le grand pectoral tire l’aile vers le bas (également appelé pour cette raison, le muscle abaisseur de l’aile); le petit pectoral relève l’aile (également appelé »muscle releveur de l’aile). La ceinture abdominale constituée par les deux muscles pectoraux est bien ancrée au niveau du sternum et de la crête sternale. Des extrémités musculaires partent les tendons qui sont fortement attachés à la tête de l’humérus; celui du grand pectoral en-dessous et celui du petit peçtoral au-dessus. Pour atteindre cet endroit, le tendon suit un curieux chemin: il passe sous les os de Fa ceinture scapulaire ( scapulum, fourchette, coracoïde) et alors grâce à un petit canal,•formé .par la réunion des trois os précités (scapulum, fourchette et coracoïde). Le tendon glisse comme dans une poulie. Ceci explique pourquoi un muscle, qui se trouve en-dessous, peut relever l’aile (fig. 8).

figure 7

ceinture scapulaire du pigeon

Comme je l’ai déjà dit, l’aile ne bat pas seulement de haut en bas; des étirements et des flexions ont lieu également. Ceci grâce à la mise en jeu d’un certain nombre de muscles qui se trouvent sur l’aile, et qui sont rattachés par l’intermédiaire de longs tendons à l’extrémité de l’aile. Il est intéressant d’examiner le poids de quelques muscles. Le muscle pectoral constitue 20 % du poids du corps, le petit pectoral 3,6 %, tous les muscles de l’aile ( du bras, de l’avant-bras et de la main) ensemble 6,5 %, les muscles de l’épaule et du dos 1,3 % (d’après Hartman, 1961).
Tous ces muscles réunis constituent environ un tiers du poids du corps.
Puisque la quantité de travail fourni par un muscle peut dépendre de sa masse, on peut conclure:
1°) que beaucoup plus d’énergie sera fournie par les muscles pectoraux que par les muscles de l’aile;
2°) que l’abaissement de l’aile nécessite beaucoup plus d’énergie que son relèvement (par le petit pectoral). Ce qui nous permet de confirmer les constatations énoncées précédemment que lors du vol horizontal rapide le relèvement de l’aile est en grande partie passif.



V. Energie
A. Combustibles pour le vol

Les muscles impliqués dans le vol doivent certainement disposer d’énergie, comme tous les tissus. Pour cela, ils font appel aux trois constituants principaux de toute forme de vie: les sucres, les graisses et les protéines. Nous pouvons laisser ces dernières de côté. Il n’y a pas vraiment de réserves de protéines dans l’organisme. S’il est fait appel aux protéines, cela se fait principalement au dépens des protéines musculaires. Cela se produit seulement dans les états de carence, par exemple chez des pigeons à bout de forces du fait d’avoir erré trop longtemps. Les formes d’énergie principales sont donc les hydrates de carbone (sous la. forme de glycogène) et les graisses. Les hydrates de carbone sont les moins intéressantes. Il y a d’abord une moindre quantité d’énergie libérée par la combustion du glycogène (ou oxydation en présence d’oxygène). Dans la littérature, on trouve généralement 4-4,5 kcal par gramme de glycogène pour 9 kcal par gramme de graisse (donc plus ou moins le double).
Dans le grand livre du pigeon voyageur », j’ai écrit que la graisse était huit fois plus énergétique que le glycogène: Certains lecteurs ont cru y voir une faute d’impression. Pourtant n’en est rien.
Pour des raisons d’édition, j’ai dû comprimer mon texte, de sorte qu’il a perdu un peu de sa clarté. ici je puis mieux développer la question.
Il est juste que la valeur énergétique de la graisse est deux fois plus importante que celle du glycogène anhydre (= sans eau). Mais il faut tenir compte du fait qu’une réserve en glycogène n’est possible qu’en présence de beaucoup d’eau ( 3- 5 g d’eau par gramme de glycogène; dans les tissus le glycogène est associé à l’eau). Cela explique-que la graisse est huit fois plus calorique que le glycogène par unité de poids. Cela signifie également qu’un pigeon lors du vol tire son énergie de la graisse et qu’il a une charge à porter plus légère (1/8) que s’il .devait utiliser le glycogène (associé à l’eau) comme carburant.
Il faut également considérer que la quantité totale des réserves de glycogène (principalement présentes dans les muscles foie) est d’environ 2 grammes pour un pigeon de 400 grammes, alors que le même pigeon possède une réserve de 40 grammes de graisse en différents endroits du corps principalement situés sous la peau, autour des intestins, dans les muscles pectoraux,…) Avec sa réserve en hydrates de carbone un pigeon est seulement capable de voler une distance de 70 km. Il est donc clair que pour des vols ininterrompus d’une certaine distance, la graisse est le carburant unique; les réserves de graisse sont réservées aux vols d’endurance. Cela démontre l’inutilité de la pratique pourtant répandue de distribuer de l’eau additionnée de glucose ou de miel avant ou après le vol, c’est plus ou moins une goutte d’eau dans la mer!
Nous avons vu plus haut qu’il y a de grandes différences entre les phases de vol.
Je dois encore y revenir. Les deux sortes de carburant ont leur utilité propre. Lors de l’envol (que l’on peut comparer à un sprint de 100 m), la puissance musculaire mise en branle par les muscles pectoraux est si importante que l’oxygène disponible est insuffisant. Alors se produisent les processus chimiques qui vont libérer l’énergie, et cela sans oxygène (anaérobie).
C’est dans cette phase qu’intervient presque exclusivement le glycogène: les réserves en glycogène sont destinées à des efforts intenses de courte durée. Une fois en vitesse de croisière, la combustion des graisses entre en jeu. La graisse ne peut être utilisée qu’en présence d’oxygène dans les fibres musculaires. Au fur et à mesure que l’oxygène est consommé, il est amené par le système respiratoire et la circulation sanguine. De façon analogue, les graisses stockées doivent être amenées aux fibres pour y être brûlées. Tous ces processus sont différents d’un pigeon à l’autre, expliquant ainsi l’aptitude de certains à parcourir de grandes distances.

B. Récupération.
Il me paraît opportun de dire quelques mots sur la récupération en guise de conclusion du chapitre sur les réserves du pigeon voyageur.
Après un vol, cela me paraît important de savoir ce qu’il faut faire pour pouvoir à nouveau enloger les pigeons avec toutes les chances de succès. ll est naturel de remplacer tout ce qui a été utilisé pendant le vol. Voici les conclusions finales d’une importante discussion que j’ai apportées à la question précédemment.
L’on ne doit pas trop se soucier des vitamines, des électrolytes et des minéraux. Lors de l’activité musculaire chez les oiseaux, aucun électrolyte n’est perdu, au contraire de l’homme, tout simplement parce qu’un oiseau ne transpire pas. Les pertes en vitamines sont pratiquement inexistantes car lors de la combustion des graisses (qui comme nous l’avons vu, assure presque exclusivement la fourniture d’énergie), aucune vitamine n’intervient.
Et même si l’un de ces produits viendrait à être perdu, son remplacement serait vite effectué, et cela grâce à la nourriture, au grit et au mélange minéral présents au pigeonnier. Ce qui reste des dépenses d’eau et des réserves de combustible est perdu en fonction de la durée du vol et de la température extérieure. La récupération de l’eau perdue pendant le vol ne pose aucun problème: l’abreuvoir est toujours disponible. Il en va autrement pour les réserves de carburant. Tout d’abord les réserves en glycogène puisque celles-ci contiennent 2 g, ce problème est résolu après quelques jours (via la nourriture).
La réserve en graisse est une autre paire de manches. Apparemment, il est difficile d’obtenir de nouveau un niveau optimal car il est impossible de mettre ces valeurs en équations. Ici l’expérience est primordiale et je vais vous en parler d’un manière générale.
La plupart des colombophiles s’attendent à ce qu’un bon pigeon qui vient de voler avec succès son premier concours de fond de la saison, puisse de nouveau être enlogé après deux semaines.
Après le deuxième concours de fond, il faut faire attention. Combien de fois n’ai-je pas vu de bons colombophiles se laisser entraîner et enloger après 2 à 3 semaines les mêmes pigeons pour un troisième concours de fond. Ceci est pour le moins inadmissible. Les pigeons ratent presque chaque fois, quand ils ne se perdent pas. Il faut être très prudent, même si les pigeons semblent très beaux. Tout ce qui brille n’est pas or! Il est nécessaire de leur laisser une période importante de repos. Je ne fus donc pas du tout surpris lorsque je lus ce que le « Merckx » de Van Hee P. et F. (Wervik) fit en 1990. Il parcourut successivement Châteauroux, Brive, Cahors, Montauban et Dax, ce qui témoigne de son énorme classe. Il fut encore enlogé pour le terrible Perpignan. Ce dernier vol fut de trop; son histoire confirme que lors de l’enlogement pour Perpignan il n’avait pas complètement récupéré du vol sur Dax. Lâché à Perpignan le dimanche il fut attrapé vers midi dans le voisinage de Toulouse; il avait dû se rendre, épuisé et assoiffé après seulement 200 km. L’animal fut relâché le lundi matin et retrouva son pigeonnier le mardi. Il était clair qu’il était au bout du rouleau. Cela devrait être une leçon pour de nombreux joueurs de fond.



C. Surentraînement.
Il arrive parfois qu’on soit confronté avec une situation singulière. Ainsi il nous a été donné d’observer certains changements lors du vol dans le comportement de nos pigeons (accélérer, faire des culbutes, s’éparpiller tous azimuts) qui nous ont indiqué que la forme allait croissant.
Surtout lorsque certains pigeons trouvaient fort plaisant, jour après jour, de ne pas entendre le sifflement les rappelant au pigeonnier et de préférer continuer à voler pendant quelques heures supplémentaires. A notre grande consternation, les résultats du concours suivant furent décevants. Après deux années à réfléchir au problème, j’eus néanmoins ma petite idée.
Je commençais par croire que les pigeons qui présentaient ces manifestations avaient une telle forme qu’en donnant libre cours à cette dernière ils n’arrivaient jamais à être totalement « gonflés à bloc »: ce qui était destiné à être mis en réserve était gaspillé. Et finalement, ils étaient dans un état que je nommerai de « surentraînement » (ce qui n’est pas la même chose que le surentraînement des athlètes humains). Je n’y vis qu’un seul remède: enfermer jusqu’à l’enlogement. Je pus rapidement tester mon hypothèse qui s’avéra exacte car chaque fois les prestations des pigeons furent meilleures.
En voici les exemples les plus probants. La premier concerne un pigeon de 1959. Bien qu’il se trouvait en position de nid, ce pigeon commença à exécuter son numéro, un jour, deux jours. Alors la décision fut prise de le séquestrer jusqu’à l’enlogement du concours, l’Angoulême de début septembre 1963. A ce moment, il montra tous les signes d’une condition exceptionnelle. Cela fut confirmé par un premier national. Il était clair qu’il n’avait pas dû puiser dans ses réserves pour ce concours (650 km) car le lendemain matin il laissa exploser sa joie de vivre en volant haut sans discontinuité de 9h à 13h. Notre Barcelone II (1958) a fait la même chose en 1964; après avoir deux matins de suite éprouvé notre patience lors du rappel, nous l’avons isolé pendant les cinq jours suivants. Ensuite vint l’enlogement pour Barcelone, concours qui déboucha sur sa brillante victoire internationale. Quand je pense à ces faits, je n’arrive pas à comprendre comment j’ai été attrapé.
Je me console en pensant que je ne suis pas le seul. En fait, au cours de l’année 1990, j’ai eu l’occasion de constater à deux reprises des histoires semblables sans que la solution ne soit trouvée.
J’espère que cet article sera lu par ces colombophiles qui je l’espère pourront en tirer parti.

A suivre Prof. Dr. G. Van Grembergen


Notices:

  • Avec sa réserve en hydrates de carbone un pigeon est seulement capable de voler une distance de 70 km. Pour des vols ininterrompus d’une certaine distance, la graisse est le carburant unique. Ce sont donc des réserves de graisse qui sont primordiales dans l’endurance du pigeon.
  • Avec sa réserve en hydrates de carbone un pigeon est seulement capable de voler une distance de 70 km. Pour des vols ininterrompus d’une certaine distance, la graisse est le carburant unique.

[ Source: Article édité par Prof. Dr. G. Van Grembergen – Revue PIGEON RIT ]

Pour vous abonner au Magazine PIGEON RIT – Cliquez sur le bouton ci-dessous !

pigeon rit banner


ping gauche - pigeonLe « 217 » a pris la Pilule – pigeon voyageur

ping gauche - pigeonMortalité au Nid – pigeon voyageur