Le coryza du pigeon
Voici approcher les grosses chaleurs de l’été. Extirpons d’abord de notre esprit que c’est le froid qui provoque le coryza. Chez tous les animaux domestiques, les grosses epizooties (épidémies) d’affections respiratoires sont celles des grosses chaleurs humides, que la chaleur soit naturelle ou artificielle: pneumonies contagieuses à virus ou microbes (ou les deux) (pasteurelloses – pneumocociies compliquant les myxovirus). Les bovins ou les chevaux qui passent l’hiver dans les pâturages, s’ils sont convenablement nourris, n’ont jamais de problèmes respiratoires pendant cette période.
Alors, éliminons en même temps, le mythe du courant d’air. Un courant d’air risque d’être dangereux pour un être qui transpire. Ça n’est pas le cas du pigeon qui ne risque pas « d’attraper froid » à cause de l’évaporation brutale de la sueur au niveau de la peau, créant ainsi le froid (l’évaporation d’un liquide crée du froid). Et puis quand un pigeon vole, est-ce que ça ne crée pas un courant d’air égal à la vitesse du vol par temps calme, à la somme des vitesses par vent debout, à la différence des vitesses par vent poussant?
Mais, me direz-vous, pour avoir la forme, il faut de la chaleur. C’est vrai. Tout au moins une certaine chaleur, d’une part. Et surtout, d’autre part, une certaine régularité de la chaleur. Ce qui est mauvais, en début de saison particulièrement, ce sont les énormes variations de température entre le jour et la nuit: au bord du gel à 6 h. du matin, 20 ou 25° l’après-midi. C’est là qu’une judicieuse organisation de la conception et de la régulation thermique du colombier prend toute sa (grande) valeur. Colombier construit en matériaux peu conducteurs de la température, donc étalant dans le temps réchauffement et refroidissement des locaux. Aération discrète mais continue par tous les temps, assurant l’élimination rapide des gaz délétères (carbonique -méthane – vapeur d’eau ). Le test de la cigarette dont la fumée est évacuée lentement mais sûrement par tous les temps, toutes les températures, de tous les points du colombier, par le toit garde toute sa valeur. L’appoint d’un extracteur électrique peut être envisagé. Voilà pour le « milieu ». Car comme pour la plupart des maladies, le « terrain organique » joue un rôle de premier plan dans les problèmes de coryza. Les colonies qui rechutent systématiquement après un traitement apparemment efficace connaissent, dans la plupart des cas, des problèmes d’habitat. A l’amateur d’avoir la tête assez froide pour mener une enquête -sans a priori – seule capable de lui révéler « où le bât blesse ». La plupart des pigeons sont « porteurs sains » de germes capables de provoquer le coryza: staphylocoques, klebsielles, colibacilles, entérocoques, mycoplasmes, herpes-virus etc. Auxquels il faut ajouter les parasitismes locaux comme le trichomonas, ou intestinaux qui se contentent d’affaiblir le pigeon, tels que coccidiose, voire quelques vers.
Les symptômes sont à l’origine d’expressions populaires: oeil mouillé, tête de hibou, inflette, tchic qui en fait désigne le même mal avec des signes plus ou moins nets ou importants. Les séjours au panier, lieu éminent de contamination, tant par la promiscuité que par la conception lamentable de certains véhicules, ne permettent à aucun pigeon de ne pas connaître de contamination. Il n’est qu’à voir à quelle vitesse se développent les coryzas du mois d’août, tout comme la paramyxo (chez les pigeons non vaccinés valablement) au lendemain des concours, surtout s’il y a eu un lâcher remis. Lorsqu’on examine à fond des pigeons d’une colonie à coryza, il y a une constante. Sauf traitement préalable, tous sont porteurs de trichomonas, et en grande quantité. La collusion trichomone- microbes (et virus éventuellement) est de règle. Sachant d’une part que la contamination au panier (abreuvoir-graines vomies et avalées aussitôt par un autre pigeon) est extrêmement fréquente, d’autre part qu’aucun antitrichomonas ne bloque ce parasitisme plus de 4-5 semaines et souvent beaucoup moins (les fabricants sont souvent très optimistes sur les délais de protection), de petits traitements systématiques de 2-3 jours, au retour du concours, toutes les 2-3 semaines selon le produit utilisé, contre cette trichomonose s’impose. C’est la première prévention à faire, impérativement. La trichomonose « fait le lit » du coryza. Ensuite, il y a les microbes. Leur extrême diversité fait qu’aucun antibiotique n’est à coup sûr actif contre tous.
Et je ne parle pas de l’herpesvirus, contre lequel nous n’avons encore aucune arme. Bien sûr, l’amateur qui a eu l’occasion de faire établir un diagnostic complet par un laboratoire sérieux et compétent en matière de pigeons, (En ai-je lu des âneries!) connaît les antibiotiques actifs chez lui. Alors force est d’employer un ou une association d’antibiotiques actifs contre le plus de germes possibles, classiques du coryza. Sous quelle forme?
Le mieux est évidemment l’eau de boisson. Il faut employer la dose nécessaire et suffisante. La renouveler matin et soir. Le traitement doit durer au minimum 3 jours (rappel) et mieux 5 jours (traitement d’attaque). A noter que certains antibiotiques ne traversent pas l’intestin et ne présentent donc aucun interêt contre le coryza: streptomycine – gentamycine – néomycine – framycétine par exemple.
Les piqûres seront réservées aux cas aigus et ne sont pas du domaine de la prévention. Enfin, les gouttes oculo-nasales (yeux – narines) sont inoffensives. Données au retour, voire avant l’enlogement, elles désinfectent une petite partie de l’appareil œil – nez – gorge. Pour qui connaît l’extrême complexité anatomique des fosses nasales et des sinus, la relativité de leur intérêt ne fait aucun doute.
Doct. Vét. J.P. Stosskopf
Notices :
- Comme pour la plupart des maladies, le « terrain organique » joue un rôle de premier plan dans les problèmes de coryza. Les colonies qui rechutent systématiquement après un traitement apparemment efficace connaissent, dans la plupart des cas, des problèmes d’habitat. A l’amateur d’avoir la tête assez froide pour mener une enquête – sans a priori – seule capable de lui révéler « où le bât blesse ».
- Le froid ne provoque pas le coryza.
- La trichomonose « fait le lit » du coryza.
- La plupart des pigeons sont « porteurs sains » de germes capables de provoquer le coryza.
- Des petits traitements systématiques de 2-3 jours contre la trichomonose, au retour du concours, toutes les 2-3 semaines sont nécessaires. D’une part parce que la contamination au panier par l’abreuvoir ou des graines vomies, est extrêmement fréquente, d’autre part parce qu’aucun médicament anti-trichomones ne protège les pigeons plus de 4 à 5 semaines.
[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P. Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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