Les gouttes nasales pour les pigeons voyageurs
On sait quelle importance revêt la santé de la région nez-gorge-oreilles-yeux dans le rendement sportif de nos pigeons. Actuellement une forte proportion de colonies partent avec un énorme handicap – en particulier dans le demi-fond et le fond -parce que leurs pigeons sont atteints d’un coryza chronique, plus ou moins net, avec de temps à autre – surtout par temps chaud – un cas aigu avec larmoiement, éternuements, démangeaisons du nez, voire écoulement nasal. Jusqu’ici, et encore aujourd’hui en automédication, on employait des gouttes nasales pour tenter de tenir en respect ou pour essayer de guérir ces affections nasales.
Si, selon leur composition, ces gouttes nasales étaient plus ou moins efficaces, cette relative efficacité était de toute façon limitée aux zones atteintes par le produit. Or l’anatomie de cette région « nez- gorge- yeux-oreilles » est d’une extrême complexité: sinus tortueux, lamellaires, fins canaux (canal lacrymal- trompe d’Eustache) qui se bouchent très facilement par inflammation toujours importante quand il y a coryza. Il est impossible que les gouttes désinfectantes administrées dans chaque oeil et chaque narine, pénètrent partout et permettent ainsi une désinfection convenable. Il est donc vain d’espérer une guérison, au moins apparente, avec ces seules gouttes nasales. J’ai évoqué plus haut, la composition de ces gouttes nasales. Deux grands groupes: les formules basées sur la seule désinfection, contenant des antiseptiques chimiques ou antibiotiques. On y adjoint parfois des calmants destinés à éviter les réactions de grattage et d’éternuements.
Autres formules, celles alliant désinfectants chimiques et produits irritants, destinés à provoquer la formation abondante de mucus (cela fait « couler le nez ») censé entraîner microbes et particules inflammatoires et dégager les voies nasales. Cette technique a amplement montré sa non-valeur et hormis le « plaisir » d’éliminer le mucus abondamment produit au moyen d’un coton tige, l’amateur n’en tire guère de profit, et le pigeon encore moins.
Les excipients, c’est-à-dire le support des produits actifs est lui aussi variable. Cela va du sérum physiologique (eau salée à 1 %) à la vaseline. Entre les deux, des solvants dits aqueux parce que contenant de l’eau, mais additionnée de nombreux produits améliorant la pénétration, la stabilité du principe actif ou des solvants dits huileux, plus ou moins épais et additionnés eux aussi de nombre de produits annexes.
Remarquons tout de même que la fluidité du produit (à 35° C environ, température des cavités nasales) favorise sa pénétration et que les solutions aqueuses se mêlent plus facilement aux sécrétions nasales elles aussi aqueuses.
Comme je l’ai maintes fois écrit, le coryza c’est la trichomonose associée à des microbes divers et éventuellement des virus. On conçoit donc que le seul traitement local des microbes, traitement avec tous les aléas exposés ci-dessus ( efficacité sur les microbes plus ou moins grande- impossibilité d’un « nettoyage » de toute la région) ne peut donner de résultats profonds, d’autant qu’il n’a aucune action sur les trichomonas base même de l’apparition d’un coryza aigu. Certes on peut admettre l’utilité de ces gouttes à titre préventif: persistant quelques heures sur la paroi interne (la muqueuse) des premières voies respiratoires, il pourra enrayer quelques contaminations. Mais après ce temps et de toute façon dès la prêmière consommation à l’abreuvoir, le produit, lavé, n’aura plus aucune action. Cette observation nous amène à évoquer la technique d’administration de ces gouttes. L’abreuvement lavant immédiatement les premières voies respiratoires et la bouche (qui communiquent comme chacun sait par la fente palatine), il sera indispensable d’administrer ces gouttes nasales un bon moment après le repas, de manière que le principe actif reste au contact des muqueuses nasale et buccale le plus long temps possible. Le soir est évidemment la meilleure heure, le produit persistant ainsi toute la nuit, jusqu’au repas du matin. On a beaucoup parlé, depuis un an ou deux, de 2 collyres huileux, à usage humain, contenant antibiotique et corticoïde. Je ne dirai plus rien sur l’antibiotique, de valeur relative sur les souches microbiennes rencontrées chez le pigeon. Par contre l’emploi d’un produit contenant un corticoïde (en fait il en est ainsi pour toutes les gouttes nasales et oculo-nasales contenant un corticoïde de quelle que soit la marque) a permis de constater que ce produit, administré 2 fois par semaine avait’ le pouvoir de retarder la mue des pigeonneaux. Ce qui est très intéressant en saison sportive. Cependant il importe de ne pas commencer cela juste avant la chute d’une rémige. Toute rémige en cours de croissance au début du traitement sera nettement marquée. Je n’ai jamais lu d’explication médicale à cette action secondaire (le corticoïde n’est là, initialement, que pour couper l’inflammation locale au niveau du nez et des yeux). L’absorption du corticoïde, à dose très très faible, se fait au niveau des muqueuses et de la glande de Harder (au coin de l’oeil) mais quel est le mécanisme intime de l’action? Aucune explication scientifique actuellement.
Tout cela n’a rien à voir bien sûr avec l’utilisation des corticoïdes à titre de doping chez les pigeonneaux. Laissons cela aux apprentis sorciers.
Doct. Vét. J.P.Stosskopf
Notices :
- Les gouttes nasales ne suffisent pas pour guérir des affections nasales comme le coryza. Il faut savoir que les organes « nez- gorge- yeux- oreilles » forment un ensemble et que cette région est d’une extrême complexité. Il est impossible que les gouttes désinfectantes administrées dans chaque oeil et chaque narine, pénètrent partout et permettent ainsi une désinfection convenable.
[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P.Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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Maladies respiratoires – n°1 – pigeon voyageur