Les pigeons sont-ils moins résistants qu’autrefois ?
Poser la question c’est reconnaître l’existence de ce problème. Y apporter des éléments de réponse et une solution, c’est tout autre chose.
Le bilan sanitaire de ce début de saison (cet article est écrit début juin) met en évidence de nombreux problèmes chez les pigeonneaux.
L’adénovirose.
Un certain nombre de mortalités précédées par de la diarrhée avec parfois des vomissements ont régulièrement été observés en ce début de saison (et les premiers entraînements viennent seulement de commencer).
Il s’agit d’adénovirose, pensez-vous. En effet, ces symptômes sont généralement ceux observés lors d’une infection par les adénovirus. Il s’agit ici bien entendu de l’adénovirus 1 des jeunes pigeons. Certaines colonies ont enregistré jusqu’à 30% de morbidité avec de nombreuses mortalités.
Il est étonnant de constater que dans d’autres colombiers la maladie reste bénigne et se résume à une simple diarrhée passagère, accompagnée d’une méforme des pigeonneaux.
L’adénovirose 1 est souvent compliquée par des bactéries (presque toujours E. coli).
Ces complicants bactériens aggravent fortement les symptômes et provoquent la mort de l’oiseau. Il est donc logique d’avoir recours à un traitement aux antibiotiques (pour » combattre » ces surinfections bactériennes). Pour être efficace ce traitement doit être adéquat et la bactérie incriminée y être sensible. Cet antibiotique doit avoir une bonne résorption intestinale et une large diffusion tissulaire (votre vétérinaire peut vous conseiller à ce sujet).
A notre avis, les quinolones de la 3ème génération représentent le traitement de choix.
Or le plus souvent, malgré le traitement aux antibiotiques, de la mortalité continue à être observée dans certaines colonies.
C’est que » un train peut en cacher un autre « .
Le diagnostic d’adénovirose, sans être faux, est cependant incomplet.En effet, dans 80% des cas d’autopsie des jeunes pigeons pour lesquels l’adénovirose 1 a été diagnostiquée, cette virose était associée aux circovirus (voir notre article P.R. mars 1999).
Pour rappel, ces virus ont un effet immuno-dépresseur qui s’explique par l’atteinte de la bourse de Fabricius. Cet organe joue un rôle fondamental dans la formation et le développement du système immunitaire (en oubliant toutes les notions scientifiques et pour parler en langage colombophile clair, nous pourrions dire qu’il s’agit d’une forme de » SIDA » des pigeons).
Depuis quelques années, les colombophiles parlaient du complexe » adénovirose-coli « , je crois qu’il faut maintenant parler du complexe « adénovirosecircovirose »
Quelques autres cas de maladies observées en ce début de saison.
Comme vous le savez, la vaccination contre la paramyxovirose a été rendue obligatoire au début de l’année. La presse colombophile en a fait grand écho.
Pratiquement tous les pigeons ont été vaccinés et pourtant nous avons eu l’occasion de voir une dizaine de jeunes pigeons « vaccinés » présentant des
troubles nerveux caractéristiques de la paramyxovirose.
Dans ces cas-là, le colombophile a beau jeu de dire que c’est la faute du vétérinaire qui a mal effectué la vaccination, ou que le vaccin ne serait pas de bonne qualité (ce qui serait proprement scandaleux, vu le prix payé!).
Qu’en est-il réellement?
L’autopsie de ces pigeonneaux nous a permis de constater (grâce à des examens de laboratoire élaborés) que ces pigeons étaient également contaminés par les circovirus.
Cette maladie, la circovirose, avait anéanti tout le bénéfice de la vaccination.
Ces pigeons, dont le système immunitaire était déficient, n’ont pas été capables de « fabriquer » des anticorps, donc de « construire » une bonne défense vis à vis des paramyxovirus.
Cela peut d’ailleurs donner lieu à des problèmes.
Ainsi, nous pensons à un colombophile de la région de Liège qui a eu son colombier mis en quarantaine au début de la saison de jeu par l’Inspection vétérinaire. En effet quelques pigeonneaux « vaccinés » présentaient des symptômes nerveux (type paramyxovirose).
Lors d’un entretien téléphonique, ce colombophile nous certifiait que ses pigeons avaient été vaccinés. Il est possible que ce colombophile était sincère et qu’il s’agissait de quelques pigeons contaminés par les circovirus.
Nous précisons toutefois que nous n’avons pas eu l’occasion de vérifier cela car nous n’avons pas effectué les autopsies de ces pigeons.
Si ce colombophile n’a pas menti, la circovirose reste l’explication la plus plausible à son problème.
N’allez pas croire que les « dégâts » de la circovirose se limitent à ces deux cas.
Mortalités dans les nids.
Les circovirus sont responsables de la mortalité des jeunes pigeons dans les nids. Ainsi nous avons eu l’occasion de diagnostiquer cette virose chez quelques pigeonneaux âgés de 8 à 15 jours, trouvés morts dans les nids. Tous les examens bactériologiques (Salmonella, Streptocoques bovis …) étant restés négatifs, il n’a pas été possible de trouver d’autres explications à la mort de ces jeunes pigeons que la circovirose.
Troubles respiratoires.
Nous avons également vu en consultation des jeunes pigeons (d’environ 2 mois d’âge) présentant des troubles respiratoires graves.
Quelques uns ont été sacrifiés et immédiatement autopsiés.
Ces oiseaux présentaient des lésions typiques de maladies respiratoires chroniques (CRD) avec épaississement et fibrose des sacs aériens. L’un des pigeonneaux présentait une forte hépatite qui s’avéra, suite aux examens de laboratoire, n’avoir rien à voir avec l’adénovirose mais dont la cause était l’ herpesvirus.
Il est important de signaler que tous ces pigeonneaux souffraient une forte nécrose du système immunitaire due à la circovirose. Ceci explique leur sensibilité aux infections respiratoires.
Ce cas a d’ailleurs été observé dans plusieurs autres colonies.
Au cours de ce début de saison, la circovirose a également été diagnostiquée en association avec l’ornithose, la paratyphose et la coccidiose (+ de 100.000 oocytes par g. de matière fécale).
Conclusions.
Pour nous, il ne fait aucun doute que c’est dans cette maladie virale qu’il faut trouver la cause de l’affaiblissement bien réel de la résistance de nos pigeons voyageurs et le recours trop fréquent aux traitements médicamenteux. Cela pose d’ailleurs de véritables questions: lors des ventes de pigeons (où des sommes importantes sont consacrées aux achats),
comment être sûrs que les pigeons achetés ne seront pas porteurs de ce terrible virus. L’argent dépensé pourrait nous apporter bien des misères?
Il semble que ce virus que nous avons mis en évidence pour la première fois en Belgique en 1997 progresse lentement mais sûrement au sein de la population colombophile.
Il est temps que les Instances Fédérales Internationales se penchent sur ce problème et décident de donner des moyens financiers aux chercheurs pour permettre à ces derniers d’y apporter des solutions.
C’est tout l’avenir de la colombophilie mondiale qui est en jeu.
Allons-nous laisser anéantir le résultat d’une centaine d’années de sélection de ce magnifique athlète ailé qu’est notre pigeon voyageur moderne?
[ Source: Article édité par Ing. J.P.Duchatel – Revue PIGEON RIT ]
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Les Trichomonas – pigeon voyageur