Les queues d’hirondelles et les pigeons
Queue d’hirondelle et les pigeons, dont il est question dans cet article.
Il y a peu de temps, différentes études scientifiques traitant d’aspects particuliers de l’aérodynamique du vol ont été publiées.
Le lecteur peut s’étonner qu’il existe une curiosité scientifique pour de telles questions. Mais lorsqu’on apprend que ces études sont subsidiées par l’industrie aéronautique, on se doute immédiatement que ces études débouchent sur des applications pratiques. Beaucoup de ces études concernent la queue des hirondelles communes (mais des constatations similaires ont été faites pour d’autres oiseaux). La queue est pendant le vol en mouvement: son étalement et sa position par rapport au corps se modifient constamment et ceci afin de maintenir la stabilité. Ainsi l’étalement est important lorsque la vitesse de vol est faible. Sans queue, le vol est difficile puisqu’il y a danger de culbute. Lors de l’allongement artificiel de la queue, la stabilité augmente mais également la consommation d’énergie. Il faut penser que la queue crée lors du vol une force ascensionnelle (lift) qui est plus importante que la pesanteur. Lorsque la queue est plus grande, ce rapport de force est modifié au désavantage du lift. En même temps les manoeuvres deviennent plus difficiles ce qui crée un véritable handicap. Cependant, ce n’est pas toujours le cas.
Des observations précises d’hirondelles en vol (à l’aide de caméras et de films ultra-rapides) et dans des tunnels ventilés ont mis en évidence que différents types d’allongement de la queue produisaient différents effets quant à la consommation d’énergie. Ainsi les longues queues fourchues, dont l’allonge-ment était limité jusqu’aux plumes de queues les plus extérieures (ce qui est le cas de l’hirondelle commune), sont optimales du point de vue aérodynamique: elles fournissent un gain d’énergie parce que la force ascensionnelle augmente plus rapidement que la force de gravité. La lecture de ces données me rappellent des souvenirs liés à mes résultats avec les pigeonneaux.
Pour la compréhension, surtout pour les jeunes lecteurs, je rappelle que mon équipier (J. De Raedt) et moi-même avons été d’actifs colombophiles de 1955 à 1975.
Au sevrage, les jeunes pigeons quittaient mon pigeonnier d’élevage pour les pigeonniers de jeu de mon ami.
Les reproducteurs étaient toujours accouplés au début du mois de février (Chandeleur). Donc pas des jeunes précoces mais des jeunes du printemps nés au début mars et auxquels venaient s’ajouter encore quelques jeunes de la deuxième tournée. Chaque année, partaient ainsi une cinquantaine de jeunes vers le mini pigeonnier de De Raedt: 2 m de hauteur, 1,5 m de large et 3 m de profondeur (un volume de 9m3). D’après les normes classiques cela est trois fois trop. Il y avait une bonne ventilation (mais sans courant d’air), due au fait que les fenêtres restaient ouvertes jour et nuit.
Chez nous, il n’était pas question de séparation des sexes, ni d’éclairage artificiel ou d’obscurité, ni de substances freinant le déroulement de la mue (ces dernières n’existaient pas encore), pas d’accouplements avec des vieux mâles ou des vieilles femelles. Peut-être, nos jeunes trouvaient-ils une motivation dans la jalousie et la défense de leur planchette. Pour la vaccination contre les poquettes et pour les traitements préventifs contre la coccidiose et la trichomoniose, nous laissions les choses suivre leur cours. De temps en temps il arrivait que des couples se formaient et édifiaient des nids dans un des quatre coins du pigeonnier, surtout à la fin de la saison de vol, de sorte que nous enlogions parfois quelques jeunes sur des oeufs mais jamais avec des jeunes dans le nid. On peut facilement s’imaginer dans quel état de mue se trouvaient les pigeonneaux à l’époque des deux derniers concours nationaux pour pigeonneaux qui se déroulaient sur Angoulême (650 km). J’ajoute également qu’à l’exception de quelques mâles préférés, tous étaient enlogés quelque soit l’état du plumage, avec des cous déplumés, des trous dans les ailes et dans la queue. Donc sur tous les points notre comportement était en contradiction avec ce qui était et ce qui est encore conseillé d’une manière générale (comme je l’ai encore lu dernièrement dans l’interview d’un colombophile ayant de nombreux succès). A savoir: « qu’il n’est plus possible de se défendre dans les concours début septembre avec des moyens naturels ».
Je ne peux pas être d’accord avec une telle affirmation. D’une manière succincte, je puis affirmer que nous n’avons jamais eu une raclée sur Angoulême avec nos jeunes pigeons. Au contraire nous avions chaque fois des jeunes au début du classe-ment. Comme preuve voici quelques exemples. Ainsi une de nos jeunes femelles (2ème marquée) gagna le premier national sur le deuxième Angoulême de 1961. Et ce n’était pas un cas isolé chanceux car sur l’Argenton extrêmement dur de 1969 nous avons remporté avec notre premier marqué le premier provincial, le 1er interprovincial et le Sème national (seulement battu par 4 pigeonneaux enlogés au sud du Hainaut, une distance de vol 100 km plus courte). Une autre femelle remporta le 6 septembre 1958 comme première marquée le 28ème national sur Angoulême et 14 jours plus tard également sur Angoulême le 7ème national. Oh, je sais bien que certains viendront affirmer que tout cela s’est passé il y a bien longtemps et que maintenant ce n’est plus possible. A cela.je puis répondre, que déjà à l’époque 95% des jeunes enlogés l’étaient avec une frappe pleine, car ils se trouvaient avec des jeunes au nid. Je ne conteste pas que les concours soient actuellement plus rapidement clôturés et que la qualité moyenne des pigeons et leur état de santé soient meilleurs mais la vitesse des pigeons de tête n’est certainement pas plus élevée. Dans des conditions semblables, les pigeons d’il y a trente ans, remportant les premiers prix volaient aussi vite que les vainqueurs actuels. J’ose affirmer catégoriquement que les très bons pigeons comme ceux cités ci-dessus et qui ont pu se mettre en évidence par trois fois et qui malgré leur handicap, ont été capables sans lassitude et sans discontinuité de voler 10-11 heures, ne devraient pas être aujourd’hui joués pour rien, ils seraient de nouveau en tête du classement. Mais jusqu’à présent je n’ai encore rien dit en rapport avec le titre de l’article. Mais cela vient. Le concours pour lequel nous avions enlogé nos pigeonneaux avec beaucoup de risques mais en connaissance de cause était le dernier Angoulême de la saison, organisé à la mi-septembre par Cureghem centre.
Les pigeons étaient encore enlogés à Ledeberg dans le local « De Blauw Duif » disparu depuis longtemps. Je ne me souviens plus très bien de l’année mais cela n’a pas une grande importance… Cela a dû se passer entre 1962 et 1969. La mue de nos pigeonneaux était telle que leur manteau était réellement fichu. Notre première marquée était même la plus déplumée. Elle avait la queue d’hirondelle la plus parfaite (une queue fourchue)qu’on puisse imaginer. Il restait uniquement les plumes extérieures de chaque côté de la queue, toute la partie intérieure avait disparu. Je n’oserai plus écrire cela quand il n’existera plus de témoins à ces faits. Un de ceux-ci est mon ami Armand Seghers de Zelzate (il était à l’époque, le meilleur gardien de but de Belgique et jouait dans l’équipe A.A. Gent de Division 1).
Dernièrement, j’ai encore parlé avec lui de ce cas.. Lui non plus, ne sait plus donner une date précise. Quoi qu’il en soit, lorsqu’il vit les 8 ou 9 jeunes que nous allions enloger il resta perplexe et se demanda réellement ce que cela pouvait donner. Il fut encore plus perplexe lorsqu’il vit le résultat: tous nos jeunes pigeons firent prix, le 1er marqué remporta le 1 er régional (très tôt au national également) plus trois autres prix de tête.
Je ne m’étais certainement pas attendu à quelque chose d’aussi incroyable puisque comme tout le monde je voyais surtout dans la situation du premier marqué un réel handicap. Mais à la lumière des données des différents articles cités, je commence à penser que la queue en forme de fourche n’est pas réellement un handicap, mais bien un avantage. Qui tranchera?
Je dois encore ajouter que les conditions météorologiques nous étaient favorables. C’étaient des conditions de vol idéales: sec, une température agréable, pas de vent. Cela aurait certainement pu se dérouler dans de plus mauvaises conditions.Un autre point important mis en évidence par les recherches, principale-ment effectuées sur les hirondelles, est l’influence négative de l’asymétrie, aussi bien celle de la queue que des ailes, sur les prestations de vol. Cette asymétrie crée une augmentation de la consommation d’énergie et une diminution des possibilités de manoeuvre. Par ailleurs, ces études ont montré que c’est l’asymétrie des ailes qui a l’effet le plus défavorable. Puisque de temps en temps chez le pigeon les pennes (ou les plumes de la queue) ne muent pas précisément des 2 côtés en même temps, créant ainsi une asymétrie, c’est cette dernière constatation qui est la plus intéressante pour le colombophile. Pendant la saison de vol, il faut être attentif en cas de mue asymétrique des pennes parce que ce fait montre non seulement un certain dérèglement du métabolisme mais également par ce que nous savons maintenant qu’il constitue un handicap aérodynamique. Donc avec de tels oiseaux, il faut se tenir deux fois plus sur ses gardes avant de les enloger pour un concours. Il s’agira d’être prudent même avec de très bons pigeons et de ne pas les marquer sur toute la ligne.
Prof. G. Van Grembergen
Notice:
La queue est pendant le vol en mouvement : son étalement et sa position par rapport au corps se modifient constamment. Cela assure une meilleure stabilité. Ainsi lors d’un vol à vitesse lente l’étalement est important mais par contre le vol sans queue est difficile car il y a risque de culbute. Il est important également de mentionner qu’en vol une queue normale crée une force ascensionnelle plus importante que la pesanteur.
[ Source: Article édité par Prof. Dr. G. Van Grembergen – Revue PIGEON RIT ]
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