L’hérédité mal comprise (2) – pigeon voyageur
Elevage et vieillesse.
En s’appuyant sur la constatation que les jeunes pigeons sont plus vifs que les vieux, certains amateurs pensent augmenter la combativité, la vitalité et donc la qualité de leur colonie en accouplant exclusivement des pigeons relativement jeunes; au contraire produire avec de vieux pigeons (par exemple 10 ans et plus) conduirait inévitablement à la déchéance.
Lors du choix des reproducteurs, certains donnent la préférence aux derniers jeunes, d’autres aux premiers jeunes d’une femelle. Pareil raisonnement est tout à fait faux: il n’y a aucun effet de la jeunesse ou de la vieillesse sur les caractères héréditaires; ces derniers ne se modifient pas avec la vieillesse.
Pour soutenir cette affirmation, je pourrais facilement m’appuyer sur la science, mais il y a également beaucoup de preuves chez l’homme: les enfants issus de pères âgés ne sont pas moins bien, ni en moins bonne santé ou moins intelligents que les autres. Je tiens également à apporter mes propres constatations chez le pigeon. J’ai toujours considéré mes vieux pigeons avec beaucoup de respect, même lorsqu’ils étaient devenus « usés » (par exemple au niveau des muscles) et je m’en suis toujours bien trouvé. Je sais très bien que certains colombophiles, qui lisent ces lignes, vont hausser les épaules. puisqu’ils pratiquent autrement. Mais combien de colombophiles peuvent-ils émettre un avis sensé concernant cette situation? Ils n’utilisent pas de vieux pigeons pour la production et ne peuvent même plus en utiliser puisqu’ils les ont fait disparaître depuis longtemps! Encore un « tabou ». Un pigeon doit être formé, être adulte avant d’être utilisé comme producteur. Ceci est également faux: à partir du moment où les cellules sexuelles sont formées, le résultat de l’élevage peut être bon. A ce sujet j’ai eu une fois une chance terrible au début de ma carrière colombophile, en baguant un jeune issu de l’accouplement d’un pigeonneau mâle du printemps (en 1955) avec une femelle d’un an. Ce fut mon « Labeeuwken », né en automne 1955, une toute bonne femelle qui à l’âge de 18 mois remporta un beau prix au Limoges National des deux ans. A l’âge de 4 ans, 4 et 6 semaines après avoir été changée de pigeonnier, cette femelle remporta sur une position de nid, par deux fois un très beau prix sur Angoulême. Ceci en pleine saison contre les veufs. Il n’était donc pas possible de parler d’affaiblissement. Il y a également diverses opinions quant à la meilleure date pour la naissance et donc pour l’accouplement: j’ai déjà donné mon opinion à ce sujet dans un précédent article « la théorie lunaire » (Pigeon Rit avril 1/92). Je le répète: la transmission des caractères héréditaires n’est pas influencée par l’état de la lune, ni par l’époque de l’année, de sorte que ce sont des sornettes que d’affirmer que les voyageurs sont élevés au printemps et les producteurs en automne!
Production et participation aux vols et entraînements.
Lorsque les pigeons sont régulièrement entraînés, le volume de leur musculature est harmonieusement développé. A ce sujet un certain nombre de colombophiles ont Fa même opinion que Lamarck, c’est-à-dire que par l’entraînement les générations suivantes deviendront de plus en plus fortes. Au contraire, les pigeons tenus enfermés ne pouvant pas exercer leur musculature, ni développer leur sens d’orientation perdront leurs qualités héréditaires de voyageurs et doivent donc pas être utilisés comme reproducteurs. Le commentaire sera court. Un grand nombre de colombophiles, parmi lesquels de très bons joueurs, tiennent leurs reproducteurs enfermés en volières pour éviter les pertes et les empoisonnements aux champs. Personnellement, je n’ai jamais privé mes reproducteurs de liberté mais beaucoup n’ont jamais vu le panier de voyage. Un seul exemple. Le père du meilleur pigeon que j’ai élevé (le 016 de 1971). vainqueur de la Coupe du Roi en 1975. ne fut jamais entraîné; c’était un fils de notre Barcelone Il (de 1958), vainqueur international de Barcelone en 1964. après avoir été deuxième international en 1962. De nouveau, je dois affirmer que l’entraînement et la participation aux concours n’a rien à voir avec l’hérédité et ne sont pas nécessaires pour un reproducteur.
Je n’ai naturellement pas dit que l’exercice n’était pas nécessaire pour les voyageurs devant participer aux concours, mais je profite de l’occasion pour dire qu’il existe une grande différence entre les pigeons et les athlètes humains: les pigeons ont nettement moins besoin d’exercices pour obtenir la forme. A cet endroit de l’exposé, je veux encore faire part d’un cas spécial que j’ai vécu. Comme la plupart des lecteurs le savent, j’ai formé ma colonie en grande partie à partir des Van Bruaene de Lauwe. J’avais fait en 1955 l’acquisition chez cet amateur d’oeufs qui ont été couvés et élevés dans nos pigeonniers. Il y avait entre autres deux femelles provenant du « Goudklompje ». L’une était petite mais bien bâtie. une véritable boule de muscles. L’autre plus grande était cependant irréprochable à tous points de vue (comportement). vitalité, plumage, état général…), seul le bréchet était fortement saillant, et cela du fait que les muscles pectoraux manquaient de volume; une véritable grande « perche » qui ne serait pas capable de revenir d’une distance de 100 km! En hiver, lorsque je retournai auprès de Van Bruaene. afin qu’il me donne son avis sur le pigeon. Il fut assez surpris de voir que j’avais conservé pareil monstre. Je lui argumentai qu’il s’agissait d’une fille de son »goudklompje » et que pour cela elle avait une certaine valeur. J’étais convaincu que les qualités héréditaires n’étaient pas compromises par un défaut corporel. L’histoire me donna raison. J’ignorai tout de l’origine du défaut. La jeune Goudklompje, normalement éclose, ne montra jamais aucun signe de maladie. et s’éleva normalement, vivante et pleine de vitalité. Je supposai que les muscles pectoraux ne s’étaient pas développés suite à un dérèglement pendant le développement embryonnaire (il faut tenir compte du transport des oeufs). A partir de cet exemple, je puis conclure avec certitude qu’il faut faire attention de ne pas trop vite considérer la façon dont une chose évolue, comme étant le résultat de l’hérédité.
Prof. Dr. G. Van Grembergen
Notices :
- Il est tout à fait possible d’élever à partir de pigeons enfermés. Le fait qu’un pigeon ne puisse pas exercer ou développer sa musculature et ses mécanismes d’orientation, ne signifie pas qu’il ne soit pas capable de transmettre les caractères à ses descendants.
- Il n’y a pas d’effet de la vieillesse sur les caractères héréditaires. Ces derniers ne se modifient pas avec l’âge. Il ne faut pas hésiter à élever avec des vieux pigeons.
[ Source: Article édité par Prof. Dr. G. Van Grembergen – Revue PIGEON RIT ]
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