La sélection des pigeons par le panier seul
Débutant:
Nous sommes presque arrivés à la fin de juillet. Je remporte des prix mais j’ai rarement un pigeon qui se classe dans la première moitié des prix. Pour tant mes pigeons se suivent bien. Dès que le premier arrive les autres suivent d’assez près.
Si je pouvais les avoir quelques minutes plus tôt, je ferais de très beaux résultats… Hélas, je ne parviens pas, malgré les meilleurs soins, à les classer en tête.
Que dois-je faire?
Victor:
Il y a, cette année surtout, beaucoup de colombophiles qui se plaignent, comme toi, de ce que leurs pigeons n’ont pas de forme. Il ne faut pas s’en étonner… nous sommes le 20 juillet et nous n’avons pas eu encore cette chaleur dont la plupart des colombiers ont besoin pour mettre les pigeons en forme. Les records d’humidité et de froid des mois de mai-juin et juillet sont à l’origine du manque de forme dans la plupart des colombiers.
Débutant:
Il faudrait donc pouvoir disposer d’un colombier, tel que Gust Ducheyne le préconisait: une boîte dans une boîte.
Victor:
Il ne faut pas exagérer – mais l’idée de Gust Ducheyne est excellente, et elle s’avère mirifique quand on tombe sur un été comme celui dont nous sommes « gratifiés »!
Je vais te donner une exemple frappant de ce que peut faire le colombier.
Il y a quelques années, un de mes amis, habitant la compagne dans un site boisé, d’ailleurs assez humide, voulut se défaire de tous ses pigeons. « Mes pigeons ne valent rien et je me rends ridicule en continuant à jouer… car je figure rarement au résultat… Voilà des années que ça dure… »
Pourtant, connaissant bien ses pigeons, des pigeons bien faits et de bonne origine, je lui conseillai de patienter encore une année, de ne pas tuer ses pigeons, mais de changer quelque chose à son colombier.
Débutant:
Mais le colombier ne peut améliorer la qualité d’un pigeon, fût-il « bien fait » dans la main…
Victor:
Là tu es dans l’erreur, car il y a plus de bons pigeons que de bons colombiers. Et je vais, une fois de plus t’en fournir la preuve. Le colombophile en question voulut bien suivre mes conseils.
Son colombier était sous les tuiles… mais les grands arbres du voisin surplombaient le toit de ce colombier du côté Nord-Est et Sud-Est.
Il ferma, avec du triplex, tout le haut du colombier, et ne laissa en tout et pour tout quatre petits trous d’aérage de 10 cm sur 10: deux dans le plafond, et deux dans la paroie orientée au Sud, où était également l’entrée. En fait ses pigeons étaient dans une boîte bien fermée, car il pouvait fermer la baie d’entrée. Il fit une ouverture de 30 sur 30 donnant vers l’extérieur, du côté Est et y installa un ventilateur électrique à très faible puissance, qui vint en permanence souffler de l’air sec dans son colombier.
Et la saison sportive débuta. Miracle: tous ses « mauvais » pigeons se classèrent comme des grands champions!
Débutant:
Mais alors la sélection par le panier aboutit parfois à éliminer des bons pigeons. Et si j’ai bien compris le panier ne servirait à sélectionner les pigeons que lorsque ceux-ci sont en forme, et cela peut dépendre en grande partie du colombier… et peut-être même des saisons.
Victor:
Là tu fais une bonne remarque. Tu dis « même des saisons », et cela est exact, car il y a des colombiers dans lesquels les pigeons n’arrivent pas à être en forme s’ils n’ont pas un vrai été. Il y a même, mais c’est plus rare, des colombiers dans lesquels les pigeons perdent la forme par les grandes chaleurs: presque toujours d’ailleurs par manque de circulation d’air.
Débutant:
Je me souviens de ce que tu m’a raconté un jour au sujet de Gust De Feyter, le manager des colombiers Havenith qui pendant de longues années fut un des plus forts sinon le plus fort de la Belgique entre les deux guerres.
Tu m’as révélé que Gust, qui touchait un pour-cent sur les gains, t’avait confié qu’en Juillet-Août, ses rentrées étaient quasi nulles, la grande forme de ses pigeons n’y étant plus.
Victor:
Tu as bonne mémoire. C’est un fait que les meilleurs pigeons du monde, sans le forme, ne sont pas capables de bien se classer. Attention donc avec la sélection par le panier.
Autre chose: il ne faut jamais éliminer un pigeon qui revient frais, mais hors des prix, sans l’avoir essayé sur des distances plus longues. Là aussi: attention avec la sélection par le panier.
Débutant:
Tu as sans doute raison, mais tout cela suppose que le colombophile ait une qualité qui se fait rare: de la patience.
Victor:
Mais sais-tu, mon ami, qu’une condition essentielle pour connaître le bonheur en cette vie consiste précisément à éliminer l’impatience…
Débutant:
Je te comprends fort bien… mais chacun a son caractère. Malheureusement on juge celui des autres, pas le sien!
Victor:
Mais revenons – en à la sélection, une matière dont on pourrait parler pendant des heures entières sans épuiser le sujet. N’oublions pas que la sélection conditionne tout l’avenir d’un colombier.
La sélection peut donc se faire par le panier à condition:
1. que le colombier soit sain
2. que les pigeons soient en forme
3. que ceux-ci soient joués aux distances pour les-quelles ils ont les qualités spécifiques.
Mais elle peut également se faire à la main, surtout dans le choix des producteurs, dont on ne sait souvent pas ce qu’ils valent. Car il ne faut surtout pas se limiter à élever hors des pigeons qui se classent le mieux.
Car, comme me le disait encore récemment mon ami André Février, le grand champion français « Un crack provient souvent d’un jeune du crack, mais rarement, du crack même ». Là intervient, dans le choix des producteurs, la main du colombophile.
Nous examinerons la prochaine fois ce que nous pouvons faire pour sélectionner à la main, et nos pigeons de voyage et surtout nos producteurs. Ce n’est pas facile, mais il y a des principes qui peuvent nous guider.
Débutant:
Je crois que je connais ces principes, car on a souvent déjà parlé de la sélection.
Victor:
On reparle souvent des choses qu’on oublie vite… parce qu’il y a loin de la coupe aux lèvres.
Nous verrons cela à notre prochaine rencontre!
Noël De Scheemaecker
Noël De Scheemaecker parle régulièrement dans ses dialogues de Gust De Feyter, le soigneur du célèbre colombier Havenith d’Hoboken. C’est chez Gust De Feyter que notre rédacteur a appris son métier. C’est de lui qu’il reçoit aussi le « Kaers » qui devint à l’Union d’Anvers le grand crack et fit la renommée des Frs. De Scheemaecker. Fick De Feyter, le fils de Gust, l’ancien secrétaire de la section provinciale à Anvers et bien connu dans les milieux colombophiles anversois. a retrouvé dans son album de famille la très belle photo que voici. Elle date des années cinquante. Nous y voyons de gauche à droite Gust De Feyter, Evrard Havenith et Fik De Feyter.
[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ]
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