Problèmes de départ avec les Pigeonneaux
Pendant les consultations, il est intéressant de remarquer comme la période des concours de pigeonneaux approche. « Docteur, mes pigeonneaux ne s’entraînent pas assez; que dois-je faire? » est la question qui m’a été la plus souvent posée cette semaine.
Quand on part entraîner des pigeonneaux qui ne font pas de belles volées autour du colombier, les pertes peuvent parfois être importantes. Pour bien s’orienter, un pigeon doit être exempt de maladie. Il est donc primordial que les pigeons soient en santé, avant de commencer leur écolage.
Beaucoup d’amateurs choisissent de traiter préventivement « à l’aveugle » contre diverses maladies (comme par exemple la trichomoniase, les vers, la paratyphose, etc … ) dans le but d’économiser une visite chez le vétérinaire. Dans la plupart des cas, cette méthode donne de bons résultats, toutefois, cette façon d’agir comporte un certain nombre d’inconvénients.
1. En tant que vétérinaire, ma philosophie est de donner le moins possible de médicaments aux pigeons pour les maintenir en santé; on évite ainsi d’intoxiquer le pigeon et on lui permet de développer sa résistance naturelle. Vous ne prenez pas non plus d’aspirine quand vous n’avez pas de maux de tête.
2. Quand on donne une cure aveugle à titre « préventif », on ne sait jamais si elle a été efficace.
Ces dernières années, je remarque qu’une affection comme la trichomoniase (le jaune), devient très difficile à traiter auprès de certains pigeons. Une cure de Ronidazole pendant 8 jours est parfois encore insuffisante. On peut traiter via la boisson ou la nourriture; la dose pour un litre d’eau est la même que pour un demi kg de nourriture, soit pour 20 pigeons.
Quand il fait plus froid, il vaut mieux traiter via la nourriture, car les pigeons risquent de boire trop peu. Si le temps se réchauffe, il est alors possible de traiter par l’eau de boisson; l’avantage de cette méthode est que les trichomones présents dans l’abreuvoir sont également tués, ce qui interrompt la chaîne infectieuse.
La semaine dernière, un amateur vient me voir pour des pigeonneaux qui volent mal. Malgré un traitement de 6 jours contre la tricho, via l’eau de boisson, je diagnostique une importante infection de trichomoniase. Après un nouveau traitement de 6 jours, cette fois sur les graines, la tricho a disparu et les jeunes commencent à voler de nouveau autour du colombier.
Si cet amateur avait commencé à entraîner ses jeunes après sa première cure, nul doute que les pertes auraient été nombreuses.
Une autre infection persistante est celle par les vers ascaris et capillaires. Ne traitez jamais préventivement, mais faites analyser les fientes avant de décider d’un traitement.
3. Un grand nombre de maladies ne sont pas guérissables par des médicaments. Quand on traite, par exemple, une forme virale d’infection des voies respiratoires supérieures, avec des antibiotiques, cela donne rarement de bons résultats. Dans bien des cas, les jeunes sont exempts de symptômes et pourtant ils continuent à mal voler.
Un certain nombre de causes peuvent être à la base de cet état de fait.
– Ne rajoutez jamais de jeunes pigeons auprès de pigeonneaux plus âgés; vous perdrez les derniers arrivés plus facilement, pendant que les plus vieux (re)feront les « maladies de jeunesse » des plus jeunes.
– Suite à du stress (surpopulation, volées forcées au drapeau, etc … ), les pigeonneaux peuvent réagir par une infection de colibacilliose.
Souvent, l’amateur a déjà éliminé quelques pigeons, qui n’étaient pas trop en ordre.
– Après une infection par colibacilles, il faut souvent plusieurs semaines avant que le pigeon soit complètement rétabli.
Le pigeon semble guéri à première vue, mais les dégâts internes (e.a. le foie, les reins) ne sont pas parfaitement rétablis. Donnez donc du temps aux pigeons avant de les entraîner à nouveau.
– Dans certains cas, les pigeons sont nourris trop fort. Dès que les jeunes sont bien aguerris, ils ont besoin de peu, d’une nourriture légère. Des jeunes nourris de façon légère volent mieux et écoutent aussi bien mieux.
– Parfois les pigeons sont nourris seulement à la rentrée, après la volée; soignés (léger) 1 h. ou 2 h. avant la volée, ils s’entraîneront souvent mieux et plus longtemps.
– Après une vaccination, surtout du genre paratyphose ou paramyxo-poquettes, il se produit parfois une légère perte de condition générale.
Si on entraîne ces jeunes 1 ou 2 semaines après, il n’est pas rare de constater des pertes anormales, ce qui n’arrive pas avec les jeunes vaccinés plus tôt.
A propos des antibiotiques
C’est la pleine période des concours à plusieurs jours de panier. La grande majorité des amateurs enloge des pigeons en excellent état. Une grande partie
des faiblards a d’ailleurs déjà été éliminée et le temps est meilleur de jour en jour. Pourtant, un certain nombre d’amateurs reviennent toujours avec les mêmes problèmes d’infection des voies respiratoires, qui semblent bien difficiles à résoudre dans certains cas. Même les colombiers qui ont pratiqué une cure préventive d’avant saison de 6 à 8 jours pour les infections respiratoires, sont confrontés à la réapparition de ces symptômes.
C’est à l’amateur qu’il incombe alors de bien examiner l’atmosphère qui règne dans ses colombiers, dont le climat dépend des conditions atmosphériques extérieures (température, humidité, vent, … ). Des modifications, parfois minimes, dans la ventilation, peuvent apporter un climat idéal pour nos athlètes ailés.
Si l’aération est correcte, mais que les résultats laissent à désirer, alors une visite chez le vétérinaire s’impose. Après un examen minutieux de vos pigeons, une analyse des gorges et du cloaque sera pratiquée. Cette analyse va permettre de diagnostiquer la présence de trichomoniase ou d’hexamitiase et une éventuelle infection des muqueuses.
La tricho est souvent la porte ouverte à d’autres infections des voies respiratoires. Des symptômes comme par exemple des yeux larmoyants chez les jeunes pigeons, disparaissent parfois très vite après une simple cure contre la tricho.
L’examen des échantillons de glaires (yeux, nez, gorge) permettra de déterminer s’il ya réellement infection. Ces infections sont diagnostiquées par la présence de cellules enflammées et/ou de bactéries dans les échantillons prélevés.
Une fois que l’infection des voies respiratoires par des bactéries est démontrée de façon certaine en laboratoire, on peut alors rechercher quelle est la bactérie responsable de l’infection.
La difficulté de cette recherche bactériologique réside dans la présence de nombreuses bactéries dans la flore bactérienne « naturelle » des muqueuses du pigeon.
Ces bactéries non pathogènes se trouvent côte à côte dans l’organisme du pigeon et veillent ainsi à rendre difficile l’installation de mauvaises bactéries, qui ne peuvent se proliférer. Si on détruit cette flore bactérienne naturelle par un traitement mal adapté, par exemple, on laisse alors la porte ouverte aux bactéries pouvant provoquer une maladie du pigeon.
Les pouvoirs publics et les fabricants de médicaments pour bétail (vaches, cochons, chevaux) ont investi des sommes colossales dans la recherche des différents agents de propagation des maladies. C’est ainsi que certaines bactéries d’E.Coli ont pu être isolées comme étant pathogènes (provoquant la maladie), alors que d’autres doivent se retrouver dans une flore intestinale équilibrée. Quand on cultive en labo une souche d’E.Coli prélevée auprès d’un de ces animaux, on sait de suite déterminer si elle est dangereuse ou pas. Du fait du peu d’importance économique de notre pigeon voyageur, ce type d’étude n’a pas été réalisé, par manque de rentabilité.
Une bactérie d’E.Coli trouvée dans les intestins ou dans l’analyse des fientes ne signifie donc pas grandchose. Par contre, si on la retrouve à une place inhabituelle, comme le foie, le sang, les poumons, les muscles, alors cela signifie qu’il y a eu infection par coli-bactéries. Il semblerait qu’une sorte particulière de bactéries (les grams négatifs) jouent un rôle important dans les infections respiratoires du pigeon. Quand une bactérie pathogène est isolée en labo, on recherche à quel antibiotique elle est le plus sensible.
Parfois, le colombophile a soigné ses pigeons avec un médicament auquel la bactérie n’est plus sensible (résistante), ou pendant trop peu de temps, ou encore en sous-dosant les quantités de produit actif. Cela se produit encore souvent avec des produits bon marché, non délivrés par un vétérinaire; le risque de sous dosage existe, à l’insu même de l’amateur. Ces préparations
contiennent en général 5 % de produit actif (soit dans un pot de 100 g, 5 g de produit et 95 g de glucose). Sous-dosage et cures trop courtes favorisent la résistance de la souche de bactéries à l’antibiotique et sont donc très nocifs. Veillez-y lors de l’achat de produits préparés du commerce.
Lors de l’analyse en labo, on vérifie quel médicament est le plus efficace pour tel type d’infection bactérienne et le traitement est donc bien plus efficient, ce qui augmente les chances de succès.
Après le traitement, on peut aussi vérifier si l’infection a totalement disparu. Quand une infection est éradiquée du colombier, on remarque souvent une amélioration directe des prestations.
L’inconvénient de ces analyses en labo est qu’elles demandent du temps (environ une semaine). Les fameux « tests éclairs » qui déterminent de quel type de maladie il s’agit en quelques heures, n’existent pas pour les pigeons. Tant que l’intérêt commercial du pigeon n’aura pas de grosses retombées économiques, il en sera, hélas, toujours ainsi.
Empoisonnements
Chaque été, des amateurs m’apportent des pigeons revenus quasi mourants d’un concours de grand fond. Dans la plupart des cas, une forte odeur de pourriture est perceptible, du fait que l’oesophage ne fonctionnant plus, un pourrissement se développe au niveau de la gorge. J’ai même reçu un pigeon venu mourir en tombant sur la planche! Après autopsie du corps, il s’est avéré
qu’il s’était empoisonné aux champs. Le pigeon de fond essaie de se trouver une pitance dans les champs sur son chemin de retour et il ramasse parfois des poisons chimiques, ou même naturels (par exemple les grains de cytise).
Quand des pigeons de grand fond rentrent visiblement malades et qu’on soupçonne un empoisonnement, la première chose à faire est de rincer le jabot.
Dans certains cas, cela permet d’éliminer le poison encore présent. On ne sait bien souvent rien faire de plus, vu qu’on ignore le plus souvent de quel poison il peut s’agir. Dans le cas contraire, » par exemple si on a pu déterminer de quel poison il s’agissait en examinant le contenu du jabot rincé, le mieux est de contacter son vétérinaire qui téléphonera au centre antipoison national, en vue d’instaurer le traitement le plus efficace possible.
Si l’amateur veut purger lui-même le jabot de son pigeon, il peut le faire au moyen d’un embout souple de pompe à vélo, par exemple, relié à une seringue de 20 ml. Remplissez la seringue d’eau et injectez directement dans le jabot. Secouez ensuite le jabot et appuyez doucement en remontant, de façon à faire ressortir l’eau et le contenu.
Recommencez jusqu’à ce que l’eau ressorte claire et sans odeur.
Laissez alors 20-30 ml d’eau dans le jabot et encore 4-6 heures plus tard. Si l’eau n’est pas digérée, il faut recommencer le rinçage, jusqu’à ce que la digestion reprenne, ceci afin d’éviter la pourriture ou l’acidification du contenu du jabot.
En clinique on injecte une solution physiologique avec un Baxter.Cette injection permet de rétablir et augmenter le volume sanguin, qui va entraîner avec lui les cellules empoisonnées (le pigeon urinera davantage). Ce baxter se place soit en sous-cutanée, soit via la moëlle d’un os long. Un baxter via la moëlle des os agit beaucoup plus vite et est préférable dans les cas graves.
Le patient peut ensuite recevoir une préparation qui va s’associer aux cellules du poison et le rendre inactif. Autrefois, on employait encore souvent une préparation à usage humain, Norit R.
Quand il s’agit d’un pigeon « à jeune », il faut séparer le pigeon empoisonné de son jeune pendant quelques jours, sinon il risque de contaminer le jeune aussi, ou lui régurgiter les médicaments reçus, ce qui risque de compromettre une guérison rapide.
[ Source: Article édité par Dr. Nanne Wolf – Revue PIGEON RIT ]
Pour vous abonner au Magazine PIGEON RIT – Cliquez sur le bouton ci-dessous !
Toujours ces pertes de Pigeonneaux