Récidives – pigeon voyageur
Quoi de plus démoralisant pour un amateur qui vient de rétablir apparemment la santé de ses pigeons, de voir quelques jours ou quelques semaines après la fin d’un traitement apparemment efficace les symptômes de la maladie réapparaître.
De nos jours beaucoup de remèdes donnent des résultats très rapides, tout au moins en apparence. Beaucoup en concluent que tout doit aller très vite. C’est vrai qu’on bloque très rapidement une crise de trichomonose ou de coccidiose, qu’on débarrasse en quelques jours les pigeons de leurs vers. Mais c’est vrai aussi qu’il faut plus que cela pour bloquer valablement une épidémie de poquettes, guérir la paratyphose ou un cas de paramyxo.
Une des plaies de la colombophilie moderne est le coryza sous ses diverses formes qu’on a affublées de divers sobriquets tels que « grosse tête », « tête de hibou » coryza sec ou coryza humide etc. Il est dû, comme chacun sait, à de la trichomonose compliquée de divers microbismes possibles dont la sensibilité à tel ou tel antibiotique est très variable et quelquefois à un herpes virus. Ce coryza frappe les colonies où sévit la trichomonose et qui vivent dans un milieu favorable à ces microbismes. Un traitement efficace passe donc par l’élimination de la trichomonose avec le Ronidazole par exemple, conjugué à un traitement antibiotique adapté au microbisme en cause (« à l’aveugle », on choisit un antibiotique efficace contre de nombreux microbes différents. On dit alors que cet antibiotique est à « large spectre »). Et souvent, après quelques jours, quelquefois quelques semaines, les pigeons rechutent. Pourquoi ? Cela peut tenir à une simple rechute de trichomonose, d’une part parce que ce parasitisme très courant peut se transmettre par l’abreuvoir commun des paniers de voyage, d’autre part parce que le Ronidazole (pas plus que les autres antitrichomonas d’ailleurs) ne peut éliminer à fond les parasites. Ce peut être dû à la présence d’un microbe insensible à l’antibiotique employé. Il est très fréquent de mettre en évidence dans les sinus des pigeons 2-3-4 germes différents. Si un seul échappe à l’action du médicament, il s’empresse de proliférer et on a un coryza à un seul germe mais coryza quand même. Enfin, lorsqu’il y a herpes virus, il n’y a aucun remède contre lui. Mais ça n’est pas tout. On sait que tout cela est grandement favorisé par le milieu, c’est-à-dire la conception du colombier. Le manque de lumière, la surpopulation, l’insuffisance de l’aération (si fréquente à cause du mythe du courant d’air) qui permet les fermentations donc la pollution de l’air respiré, les poussières tout cela « fait le lit » du coryza. Et bien peu d’amateurs savent faire leur autocritique.
Il y a quelque 40 ans, en relations épistolaires fréquentes avec un amateur liégeois, je décidai d’aller le voir. Très bien reçu, je l’accompagne très vite aux colombiers ? Dès mon entrée, je lui dis: » ça pue chez vous Monsieur ». Il a un haut le coeur et me répond: « Ah ! Pourquoi ? » Je lui propose des modifications, qu’il exécute. Un traitement général d’une semaine et la saison suivante est magnifique… et les suivantes. Nous sommes devenus très amis et encore trois mois avant sa mort , il me disait: « Je vous serai toujours reconnaissant de m’avoir ouvert (es yeux. Sans vous, j’aurais continué à piétiner ». Une autre anecdote. Un amateur me contacte parce que ses pigeons ont une violent coryza. Recherches bactériologiques et traitement efficace: tout le monde est content. Quinze jours plus tard, rechute. On recommence le traitement, renforcé cette fois. Bons résultats. Le moral revient. Encore une quinzaine plus tard, on recommence tout. On passe en revue tout ce qui peut expliquer cela. Aération augmentée, suppression de sujets de moindre valeur etc… et on refait un 3e traitement. Quinze jours plus tard, rechute. C’est l’épouse de l’amateur au téléphone. Elle m’affirme que toutes mes prescriptions ont été suivies à la lettre, quand il me vient à l’esprit « votre mari emploie du blanc de colombier ? – Ne m’en parlez pas, il en met partout. Il dit que ça désinfecte. – Arrêtez tout cela immédiatement. Brossage et aspiration s’il le faut ». Il n’y eut plus de rechutes et de simples traitements antitrichomones toutes les 3 semaines suffirent à maintenir santé et succès sportifs. Il y a des maladies qui sont coriaces. Par exemple, la paratyphose. Si on ne prend pas l’affaire au sérieux, il y a rechute parce que l’éradication du germe n’a pas été complété. Et ça n’est pas si facile que cela. La Salmonelle responsable a non seulement la peau dure mais encore des localisations très difficiles à stériliser. Les fluoroquinoles (Dicural – Baytril), le furaltadone sont les traitements chimiques habituels de la paratyphose. Notons que le chloramphénicol, par ailleurs de moins en moins employé heureusement, n’a aucune valeur contre la paratyphose du pigeon, car éliminé par les reins dans la 1/2 h. qui suit son absorption. La Salmonelle peut se localiser dans de nombreux organes: l’intestin, le foie, le poumon, les glandes sexuelles, le cerveau, les articulations. Inutile de préciser que la déloger de certains de ces organes n’est pas facile. Cela suppose non seulement un remède efficace mais aussi un traitement prolongé: l’organisme doit « baigner » dans l’antibiotique. Si on interrompt le traitement trop tôt, le germe peut proliférer à nouveau et tout sera à recommencer.
Comme cette maladie est le plus souvent à développement lent, sournoise, l’amateur va au devant de nouvelles déceptions. Surtout que certains de ces organes touchés par le microbisme sont définitivement dégénérés par l’inflammation: stérilité, boiteries ou mal d’aile, troubles nerveux et que les pigeons ainsi atteints devront être éliminés. L’éradication du mal devra donc être constatée par des analyses bactériologiques des fientes et de prélèvements sur un pigeon sacrifié. La Salmonelle, éliminée par les fientes dans la plupart des cas, souille donc toutes les installations. Une désinfection énergique, autant que possible répétée accompagnera le traitement. Sinon une réinfection est à craindre dans les plus brefs délais. Enfin je suis chaudement partisan d’accompagner ce traitement d’une double vaccination antiparatyphose (à 3 semaines d’intervalle) au moyen d’un vaccin sérieux. Un rappel sera fait 6 mois plus tard, et tous les pipants vaccinés entre 4 et 6 semaines d’âge. Nous avons parlé de réinfection à propos de la paratyphose. Il en va de même pour les vers, pour la coccidiose (qui ne rechute vraiment que dans les colombiers insuffisamment aérés et ensoleillés) dont le traitement doit toujours être accompagné d’une désinfection. Pour ces parasites, elle se fera par la forte chaleur (air chaud) seule vraiment efficace.
Doct. Vét. J.P.Stosskopf
Notices :
- Il y a encore toujours des colombophiles qui croient qu’en cas de maladie, il suffit de faire un traitement pour résoudre le problème. Pas étonnant dès lors gifle deviennent de très bons clients pour les fabricants de médicaments. Prenons par exemple le coryza sec ou humide, une vraie plaie de la colombophilie moderne, En cause très souvent un colombier mal aéré, surpeuplé etc. Si on n’élimine pas les causes… on devra traiter toute sa vie.
Dans le cas de coccidiose. vers, salmonella par exemple le traitement devra impérativement être accompagné d’une désinfection énergique des locaux.
[ Source: Article édité par Doct. Vét. J.P.Stosskopf – Revue PIGEON RIT ]
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Le courrier des lecteurs n°6– pigeon voyageur
La paratyphose du pigeon voyageur