Sur la mise au veuvage des pigeons
Débutant:
Chaque année, j’hésite, lorsqu’il s’agit de mettre mes mâles au veuvage, sur la manière de procéder. J’entends des colombophiles dire que la méthode classique est encore la meilleure, c.-à-d. d’accoupler fin février, élever une tournée de jeunes et mettre ses pigeons au veuvage, c.- à-d. enlever les plateaux et la femelle lorsque les pigeons couvent sur les oeufs d’une dizaine de jours. En fait, vers la fin d’avril. On peut évidemment avancer ou retarder la date des accouplements à sa guise…
D’autres colombophiles prétendent qu’il y a mieux: accoupler en décembre, élever une tournée de jeunes hivernaux, mais séparer mâles et femelles quand les jeunes sont âgés d’une quinzaine de jours. Ceci pour éviter une reponte. On peut alors laisser un jeune avec le mâle dans son casier, et mettre les autres jeunes dans un colombier avec toutes les femelles. Ou bien même enlever tous les jeunes, et mettre ceux-ci avec toutes les femelles dans un autre colombier. Ceci afin de ne pas « fatiguer » inutilement les mâles. Ceux-ci ont alors trois mois de repos complet jusqu’au moment où on les accouple pour une seconde fois afin de les mettre au veuvage après dix jours de couvaison. Mais je n’ai pas encore fini ! Car d’autres disent que la meilleure façon de débuter au veuvage consiste à accoupler en février ou mars et de mettre les mâles au veuvage lorsque les premiers jeunes seront âgés d’une quinzaine de jours, moment où on enlève alors les femelles pour laisser le mâle au casier avec un seule jeune.
Quand le jeune aura l’âge d’être sevré, on enlève celui-ci et le veuvage est alors complet. La saison peut débuter après qu’on aura effectué les premiers entraînements des mâles avec un jeune au plateau.
Et voilà toute ma litanie. Mais toi, comment juges-tu toutes ces méthodes? Laquelle choisir?
Victor:
La mise au veuvage, cher ami, paraît une chose extrêmement simple et toutes les méthodes paraissent également bonnes. A mon avis, ce n’est pas le cas. Et je vais t’expliquer pourquoi. Tout d’abord, il faut se rendre compte que tous les colombiers de veufs ne se prêtent pas à un élevage d’hiver. Non pas parce qu’il fait trop froid en hiver, mais parce que la plupart des colombiers de veufs ne sont pas faits pour abriter tant de pigeons à la fois.
Mettons un colombier pour 12 veufs. Il faut y ajouter 12 femelles et 24 pigeonneaux au plateau. En tout 48 pigeons. or il convient encore de savoir qu’un jeune au plateau use une qualité énorme d’oxygène. L’air sera fatalement vicié dans la plupart des colombiers de veufs pendant cette période, d’autant plus qu’on sera tenté de protéger les pigeons contre le froid en limi-tant au maximum l’aération, erreur grave évidemment, mais fréquente. Les pigeons inévitablement, par manque d’oxygène, verront alors leur sang se charger de toxines. Et c’est bien là la plus mauvaise chose qui puisse leur arriver. Cela est d’autant plus grave qu’on est obligé de servir, pour les besoins de l’élevage, une nourriture riche en protéines — ce qui va encore augmenter l’intoxication. Les chairs perdent leur couleur normale, les fientes collent aux pattes, et parfois même on remarque que les extrémités des grandes rémiges sont très légèrement souillées, et les organes respiratoires dans la gorge enflammés. Dans ces conditions l’accouplement en plein hiver a été néfaste: Le colombophile devra réfléchir à ce qu’il fait pour éviter de commettre une grosse bêtise!
Débutant:
Tu serais donc plutôt partisan d’augmenter au maximum l’aération du colombier des veufs pendant cet élevage d’hiver?
Victor:
A moins de n’y accoupler qu’un nombre limité de pigeons. Bref: il faut tenir compte de l’oxygène disponible. C’est bien simple. Réfléchis un peu: tu peux laisser un pigeon une semaine sans manger, il n’en mourra pas. Laisse-le quelques minutes seulement sans oxygène et le coeur s’arrêtera.
Débutant:
J’ai bien compris. Mais alors, d’après toi, quelle est la meilleure façon de mettre ses pigeons au veuvage, si on ne dispose pas, comme c’est mon cas, d’un colombier apte à pourvoir en oxygène le quadruple du nombre de veufs que je compte mettre au veuvage, c.-à-d. neuf mâles.
Victor:
Tu as neufs mâles dis-tu. Tous des vieux?
Débutant:
J’ai 6 vieux mâles et 3 yearlings.
Victor:
Je te conseille alors, pour les nouveau venus, tes 3 yearlings, de les laisser élever un jeune pour qu’ils s’attachent plus fort à leur nouvel habitat. Tu pourrais les mettre au veuvage sur leur premier jeune. Cela te permet de les entraîner sur ce jeune et même de les jouer une ou deux dimanches ainsi avant de leur montrer, pour la première fois, leur femelle. Les six vieux peuvent être accouplés 15 jours plus tard, afin de les mettre au veuvage sur des oeufs d’une dizaine de jours.
De cette façon ton colombier ne sera pas surpeuplé et tu éviteras ce manque d’oxygène qui est si préjudiciable à la bonne santé de tes futurs voyageurs.
Débutant:
Mais alors, je n’aurai pas de jeunes précoces…
Victor:
A moins d’accoupler en hiver tes six vieux, pour en avoir des jeunes, et d’accoupler deux mois plus tard tes trois yearlings. Tu vois qu’il y a toujours moyen d’éviter la surpopulation. Mais je voudrais ici te donner une méthode que je vais personnellement expérimenter l’an prochain. Je crois que c’est la méthode idéale. La-voici. Au lieu d’accoupler les futurs veufs avant de commencer à jouer, je ne les accouplerai plus du tout. Je l’ai essayé une année avec deux mâles, parce qu’il me manquait deux femelles. J’ai utilisé pour ceux-ci, dès les premiers concours, deux femelles qui avaient été auparavant accouplées avec mes producteurs. Eh bien, ces deux mâles, qui n’avaient pas du tout été accouplés avant la saison, furent cette année mes deux meilleurs, dès le début… et ils ont tenu le coup jusqu’au début août. Je vais renouveler l’expérience l’an prochain avec toute l’équipe de mes vieux veufs.
Débutant:
Tu m’as toujours dit que je ne devais pas croire à quelque chose, si on ne pouvait pas m’en donner le « pourquoi ».
Victor:
Et tu as raison. Tu sais que, pendant la chasse à nid et la couvaison, les pigeons ne s’entraînent presque pas. Ils font quelques tours autour du colombier… et c’est tout.
Or, si on les laisse sans femelle, ils volent beaucoup plus et on les voit voler le matin et l’après-midi pendant au moins une demi-heure en s’éloignant très loin. Le manque d’entraînement, tout juste avant le début de la saison sportive, doit certainement constituer un handicap. Tous les entraîneurs sportifs doivent me donner raison… car une musculature non entraînée n’est pas apte aux prestations sportives.
Voilà la raison qui m’incite à te parler ainsi. On verra bien… et il faudra attendre les résultats de l’an prochain.
Débutant:
Mais ce système permettrait aussi d’élever une tournée de jeunes en hiver… et de laisser les mâles veufs après la séparation sur des jeunes de 15 jours, sans plus les réaccoupler.
Victor:
Evidemment!
Noël De Scheemaecker
Notices :
- Il faut se rendre compte que tous les colombiers de veufs ne se prêtent pas à un élevage d’hiver. Non pas parce qu’il fait trop froid en hiver, mais parce que la plupart des colombiers de veufs ne sont pas faits pour abriter tant de pigeons à la fois.
- Une musculature non-entraînée n’est pas apte aux prestations sportives.
- Le manque d’entraînement, tout juste avant le début de la saison sportive, doit certainement constituer un handicap, une musculature non-entraînée n’est pas apte aux prestations sportives.
[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ]
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