Sur le pigeon de vitesse et de demi-fond
Débutant :
Au début du mois de juin tu m’as parlé des pigeons de fond. En décrivant les pigeons de Robert Willequet, de Quaremont, et en me citant un extrait du portrait de la ‘Peureuse’ tu as pu me donner une certaine idée des qualités primordiales du pigeon de fond. Aujourd’hui tu as promis de dire quelque chose sur les pigeons de demi-fond et les pigeons de vitesse et je t’écoute.
Victor :
Il faut avoir l’humilité de reconnaître qu’en matière de connaissance du pigeon voyageur, nous pouvons sans doute ‘approcher’ la vérité, mais qu’en fait les mystères de l’organisme et de ses possibilités cachées sont nombreux. On se trompe souvent sur un pigeon parce qu’on ignore ses qualités psychiques et le fonctionnement plus ou moins parfait de ses organes vitaux intérieurs. Soyons donc très prudents.
Débutant :
Mais il y a toutefois certaines qualités spécifiques aux pigeons de demi-fond et de vitesse dont tu pourrais me parler.
Victor :
Je vais être bref, prudent mais clair en commençant par dire que ce qui différencie essentiellement le pigeon de fond du pigeon de vitesse et de demi-fond, c’est l’endurance et la portée de son pouvoir d’orientation, à moins que ces deux aillent de pair, ce qui est très probable. Je pourrais, à ce sujet, te parler pendant des heures. Un fait est certain il ne sert à rien au pigeon de pouvoir bien s’orienter s’il n’a plus l’endurance pour rejoindre son colombier.
Débutant :
Mais à première vue, quelles sont, extérieurement discernables, les particularités qui, chez les pigeons de vitesse, sont différentes de celles des pigeons de fond ?
Victor :
Le pigeon de fond a plus de souplesse de vol, et celle-ci se traduit par la souplesse de l’aile, la souplesse des muscles, et un poids spécifique assez bas. Le pigeon de fond est plus léger, tient plus facilement l’air, si l’on peut s’exprimer ainsi.
Le pigeon de vitesse et de petit demi-fond c.a.d. le pigeon spécialisé dans les vols de 100 à 400 km, a plus de puissance, plus de nerf, l’aile plus allongée, l’arrière-aile portante moins importante. Il se fatigue plus vite mais est capable, lorsqu’il vole seul, de voler plus vite pendant un temps qui est limité à ses ressources intérieures. Il est souvent de taille assez forte comme le sont ou furent p.ex. les pigeons super rapides des frères Marissen, de Van Rhyn-Kloeck et de Somers, qui furent, eux, les étoiles anversoises à l’Union. Les pigeons ultra rapides de William Geerts sont également des pigeons puissants au gabarit assez impressionnant.
Débutant:
Et les pigeons Huyskens-Van Riel, dont tu m’as dit un jour que tu les considérais comme ayant été les meilleurs et les plus complets.
Victor :
Ici il y a une distinction à faire. Ces pigeons étaient d’aussi redoutables pointeurs à 100 km qu’à 1000 km.
Et pourtant… au colombier célèbre d’Ekeren, presque tous les pigeons pouvaient remporter un premier prix à Quiévrain, Noyon, Corbeil, Orléans, Châteauroux, Limoges, Libourne, St. Vincent et même Barcelone. Grâce à leur mordant, ce qui faisait dire à Jef Van Riel `nos pigeons sont des pigeons volontaires’, ils étaient capables de n’importe quel tour de force… mais au dépens de la longévité de leur carrière de pigeon de fond. Celui qui supportait le mieux les longues distances et le temps dur était le `zotteke’. C’était aussi, et de loin son plus petit pigeon.
Les autres cracks étaient des pigeons un peu au-dessus de la moyenne, en fait des vrais beaux pigeons ‘Standard’. Et à ce sujet Jef Van Riel avait cette remarque quand, parmi les bons pigeons, on a un vrai beau pigeon parfait, alors ce dernier est aussi un très grand crack, meilleur que les autres. Et il songeait à son `Bliksem’ fils de la fameuse `Boerinnekel et qui est sans doute le recordman des premiers prix à l’Union d’Anvers à toutes les distances.
Le poids fatigue tandis que l’endurance tient à la légèreté. Tout cela, évidemment, comme je te l’ai dit, c’est la règle générale, car on ne peut se rendre compte de visu quelles sont les ressources cachées d’un organisme.
Débutant :
Je me rappelle qu’un jour tu m’as répété ce que feu Monsieur Willockx, ancien responsable de la Station d’Elevage, et colombophile d’une rare expérience, t’avait dit en se plaignant de la fausse idée que les colombophiles avaient du pigeon de fond. ‘Les colombophiles sont tou-jours persuadés qu’un petit pigeon est un pigeon de vitesse, et qu’il faut de grands ‘costauds’ pour jouer le fond’.
Victor :
Oui, c’est bien cela. Un exemple parmi tant d’autres. J’ai bien connu le meilleur pigeon de fond que la Belgique ait sans doute compté au fil de longues années. C’était le ‘Petit Ecaillé’ de Maurice Delbar, le champion des champions de fond. C’était son plus petit pigeon, mais il était relativement très allongé. Il avait également un grand écaillé foncé dans son colombier. ‘C’est mon plus grand pigeon, me dit-il, mais c’est un pigeon de demi-fond. Il a trop de poids pour le fond. Jusque 500 km, c’est toujours mon premier… mais quand il doit dépasser cette distance il perd du terrain. Il ne vaut rien pour le fond. ‘Ce pigeon n’était d’ailleurs pas un Delbar. Il l’avait reçu d’un ami liégeois.
Débutant :
Il faudrait donc croire que pour la vitesse et le petit demi-fond le pigeon au physique imposant prime.
Victor:
Je crois que c’est la règle générale… avec les exceptions bien entendu. J’ai eu en mains les ‘grands’ pigeons des frères Marissen, de Van Rhyn-Kloeck, de William Geerts, tous des pointeurs extraordinaires. J’ai eu moi-même notre `grand’ et notre ‘profond’ qui remportèrent chacun deux premiers prix à l’Union d’Anvers. C’étaient nos deux grands pigeons, nos deux plus rapides aussi, mais au-delà de 400 km ils ‘peinaient’.
Débutant :
Les joueurs de vitesse et de petit demi-fond ont donc intérêt à élever des pigeons au-dessus de la moyenne…
Victor :
Je le crois. Mais il y a là un énorme danger. Pour être bon un grand pigeon doit être parfaitement équilibré. C.a.d. qu’outre une musculature puissante, il doit avoir une charpente allongée, avec une largeur entre les épaules proportionnée à la profondeur du bréchet. En outre ses ailes doivent être épaisses et suffisamment longues pour pouvoir voler vite.
Il est extrêmement difficile, pour le colombophile qui a des grands pigeons, de maintenir un équilibre parfait parmi leur descendance. Souvent ils deviennent trop lourds à l’arrière, ou trop étroits à l’avant ou bien raides comme du bois. Alors c’en est fini !
Débutant :
J’ai bien compris tout ce que tu viens de me dire… Je vais y réfléchir et peut-être que je te poserai encore quelques questions à ce sujet une prochaine fois.
Victor :
D’accord.
Noël De Scheemaecker
Le « Bliksem » était un fils de la fameuse « Boerinneke ». Il remporta à l’Union d’Anvers et à toutes les distances une série impressionnante de prix de tête.
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Maurice Delbar de Renaix, le grand champion de fond
[ Source: Article édité par M. Noël De Scheemaecker – Revue PIGEON RIT ]
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